Analyse de la Constitution Espagnole de 1978

Classé dans Droit et jurisprudence

Écrit le en français avec une taille de 6,66 KB

Commentaire de texte : Articles de la Constitution de 1978

1. Classification

Le texte est une sélection d'articles de la Constitution Espagnole de 1978, rédigée par l'assemblée parlementaire formée après l'accession au trône du roi Juan Carlos I. Il s'agit d'un texte juridique, et donc d'une source historique primaire, à caractère politique. Ces fragments des premiers articles de la constitution démocratique, approuvée par les Espagnols le 6 décembre 1978 après l'ère franquiste, ont été rédigés alors qu'Adolfo Suárez (UCD) était président du gouvernement. Les auteurs sont issus d'une commission chargée de rédiger un projet de constitution : AP (Manuel Fraga), PSOE (Gregorio Peces Barba), PCE (Jordi Solé Tura), Minorité Catalane (Miquel Roca Junyent) et trois de l'UCD (José Pedro Pérez Llorca, Miguel Herrero et Gabriel Cisneros). Suite à des divergences entre le Sénat et le Congrès, un autre comité incluant Alfonso Guerra (PSOE) et Abril Martorell (UCD) a finalisé les accords. Le 31 octobre 1978, le Parlement a voté la nouvelle constitution, approuvée massivement, et le 6 décembre de la même année, le peuple espagnol l'a approuvée par référendum. C'est un document public destiné à tous les Espagnols.

2. Contexte Historique

Le texte s'inscrit dans la période de la Transition Démocratique (1975-1982). La réforme politique d'Adolfo Suárez en juillet 1976, initiée par le roi, fut une étape décisive. Le roi nomma Adolfo Suárez, un jeune politicien issu du régime franquiste mais avec une attitude réformiste, chef du gouvernement. Suárez instaura une plus grande tolérance démocratique et entra en contact avec Felipe González (PSOE) et Santiago Carrillo (PCE) pour préparer la réforme. Le général Gutiérrez Mellado, un militaire libéral, joua un rôle clé dans la réforme de l'armée.

En septembre 1976, le projet de Loi sur la Réforme Politique, conçu par Fernández-Miranda, fut présenté. Il visait à changer le système politique et à organiser des élections. Les tribunaux approuvèrent cette loi le 18 novembre 1976, autorisant légalement la transition du franquisme à la démocratie.

Élections de 1977

Des provocations de l'ETA, de l'extrême droite et du GRAPO marquèrent cette période. En janvier 1977, des terroristes d'extrême droite assassinèrent cinq avocats du PCE et de CCOO à Madrid. Cet événement contribua à la légalisation du Parti Communiste en avril 1977. Au printemps, des manifestations aboutirent à une amnistie générale et au retour des exilés.

Le 2 octobre 1977, le Pacte de la Moncloa fut signé par le gouvernement, les entreprises, les partis politiques et les *sindicatos* (syndicats). Il prévoyait de réduire l'inflation et d'entreprendre des réformes fiscales, de la sécurité sociale et des entreprises publiques. Un nouveau cadre de relations industrielles fut également mis en place.

L'Autonomie

Peu après les élections, Adolfo Suárez contacta Josep Tarradellas, président de la Generalitat en exil depuis 1954. La Generalitat fut restaurée en septembre 1977. Le Conseil Général Basque fut également restauré. Des régimes de pré-autonomie furent adoptés, préfigurant l'État des Autonomies.

3. Analyse et Commentaires

L'article 1 définit l'Espagne comme un "État social", soulignant l'importance des droits sociaux (éducation, logement, santé, travail, etc.). L'Espagne est un État démocratique où la loi est l'expression de la volonté populaire. L'article 9.1 proclame la primauté du droit : "les citoyens et les pouvoirs publics sont soumis à la Constitution et à la législation". La Constitution garantit la liberté, la justice, la séparation des pouvoirs et l'égalité devant la loi, éliminant l'arbitraire de l'État. Le pluralisme politique est également défendu (art. 9).

L'article 2 affirme la "souveraineté nationale" résidant dans le peuple, rompant avec les constitutions libérales du XIXe siècle où la souveraineté était partagée entre le Roi et les Cortes.

L'article 3 établit la "monarchie parlementaire" comme forme de l'État. Le roi Juan Carlos est un monarque constitutionnel qui règne mais ne gouverne pas. L'article 56 précise ses fonctions : symbole de l'État et de son unité, il approuve et promulgue les lois, convoque et dissout le Parlement, convoque les élections et les référendums, propose un candidat au poste de Premier ministre, etc. Il est le commandant suprême des forces armées et arbitre le fonctionnement des institutions. Ses actes sont contresignés par le Président du Gouvernement ou les ministres concernés.

L'article 16, l'un des plus controversés, établit le caractère non confessionnel de l'État tout en reconnaissant le catholicisme comme religion majoritaire, aboutissant à des accords entre l'État espagnol et le Saint-Siège en 1979.

L'article 45 traite du droit à un environnement adéquat, intégrant les principes de protection de la santé, de promotion de l'éducation à la santé et de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles.

L'article 125 introduit la participation populaire à l'administration de la justice, une revendication ancienne présente dans les constitutions démocratiques de 1931.

L'article 137 décrit l'organisation territoriale de l'État en municipalités, provinces et Communautés Autonomes, chacune jouissant d'une autonomie. La Constitution de 1978 marque le passage d'un système centralisé à un État unitaire avec des pouvoirs régionaux. L'article 143 (voie ordinaire) et l'article 151 (voie spéciale) définissent les modalités d'accès à l'autonomie. La Catalogne, le Pays Basque, la Galice, l'Andalousie, la Navarre, Valence et les îles Canaries ont accédé à l'autonomie par la voie spéciale.

L'article 147 définit les Statuts d'Autonomie, base juridique de l'autonomie, qui établissent les principes du processus d'autonomie, les compétences assumées, les sources de financement, les institutions et le processus de réforme des statuts.

4. Conclusion

La Constitution de 1978 est un texte long et complexe, techniquement élaboré. Idéologiquement, elle est éclectique, combinant des éléments conservateurs (droit à la propriété privée) et libéraux (liberté d'entreprise) avec des éléments sociaux (promotion de la liberté et de l'égalité). Elle limite considérablement les pouvoirs de la Couronne et garantit l'exercice du pouvoir par les Cortes. La Constitution de 1978 a permis la création d'un nouvel État démocratique et la conception de la nouvelle carte régionale espagnole.

Entrées associées :