Le Biennat Réformiste en Espagne (1931-1933)
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La période entre décembre 1931 et septembre 1933 est appelée le Biennat Réformiste. Pendant cette période, Manuel Azaña a présidé un gouvernement composé essentiellement de républicains de gauche et de socialistes. Le gouvernement a fait adopter un programme d'élargissement et d'approfondissement des réformes engagées sous le gouvernement provisoire, considérées comme essentielles pour moderniser la société et l'État. Certaines de ces mesures entraient en contradiction avec les intérêts des groupes privilégiés (l'Église, l'Armée et les grands propriétaires fonciers).
Réforme Sociale
Au cours des années 1932 et 1933, le gouvernement a poursuivi son programme de réformes du travail entrepris sous le gouvernement provisoire. Ont été approuvés : l'*Employment Contracts Act* et la *Loi sur les jurys mixtes*.
Réforme de l'Éducation
Le ministre de l'Éducation, Fernando de los Ríos, a tenté de mettre en œuvre un système éducatif unifié, public, laïque et gratuit, au moins pour l'enseignement primaire, ainsi que la mixité (coéducation) des garçons et des filles. La laïcité de l'État s'est manifestée par l'élimination de l'enseignement religieux dans les écoles et la suppression des symboles religieux.
Réforme Militaire
Le gouvernement a approfondi les réformes engagées au cours de la période du gouvernement provisoire. Il a rationalisé les modèles et modernisé la préparation et la fourniture de matériel de l'armée. Mais surtout, le ministre de la Guerre, Manuel Azaña, a tenté de renforcer l'autorité de l'État face à l'Armée.
La Question Religieuse
La République s'est proposé de limiter l'influence de l'Église dans la société espagnole et de séculariser la vie sociale. La clause établissant la séparation de l'Église et de l'État a mis fin à une longue période d'entente entre l'État et l'Église, et un État laïque a émergé, rompant avec l'idée que "L'Espagne devait être catholique". L'Église et la plupart des catholiques ont considéré ces mesures comme une attaque contre la religion et sont devenus les plus grands ennemis du régime républicain.
Réforme Agraire
La réforme a amélioré les conditions de travail, mais n'a pas résolu le problème ancien qui affectait l'Espagne : la structure de la propriété foncière, c'est-à-dire la distribution inégale des terres, avec de vastes domaines (latifundia) et des paysans sans terre (journaliers). En août 1932, la *Loi fondamentale de la réforme agraire* a été approuvée. Elle a créé de grandes attentes chez les paysans sans terre et de l'inquiétude chez les propriétaires. La loi prévoyait une indemnisation pour l'expropriation des grands domaines non directement cultivés par les propriétaires, des terres incultes, des terres mal irriguées ou non irriguées, ainsi que treize autres catégories...
Autonomie Régionale
La Constitution de 1931 a reconnu le droit à l'autonomie pour les régions où le sentiment nationaliste était fort. Les nationalismes en Catalogne et au Pays Basque ont été les premiers à lancer le processus d'autonomie. En Catalogne, le gouvernement provisoire a reconnu un gouvernement autonome (la Generalitat) et a promis de soumettre au Parlement un statut d'autonomie pour la région après un référendum. Au Pays Basque, le processus d'autonomie a suivi un chemin différent. Les nationalistes, regroupés autour du Parti Nationaliste Basque (PNV), et les carlistes se sont réunis à Estella (Navarre) en 1931 et ont produit un projet de statut d'autonomie (*Estatuto de Estella*), proche du projet catalan. Le projet de Statut d'Autonomie a été contesté par la droite et l'armée, qui estimaient que l'unité de l'Espagne était menacée.
Fin du Biennat Réformiste : Crise et Élections 1933
La politique réformiste d'Azaña a suscité un mécontentement dans de nombreux secteurs de la population, tant à gauche (en particulier chez les anarchistes) qu'à droite (notamment au sein de l'Armée et de l'Église). Cela a conduit à une polarisation politique et sociale. Une conspiration militaire, active depuis le triomphe de la République, a été promue par le général Sanjurjo, l'un de ceux affectés par les réformes. En août 1932, il a mené un coup d'État à Séville (connu sous le nom de *Sanjurjada*). Sanjurjo a échoué, a été arrêté, condamné à mort puis gracié par Alcalá-Zamora, avant de s'exiler au Portugal. Le public, la presse, les partis de gauche et même la droite (qui réclamait plus d'ordre) ont attaqué le gouvernement, dont l'image a été gravement endommagée. Les socialistes ont retiré leur soutien au gouvernement d'Azaña, le laissant en minorité. Alcalá-Zamora a alors dissous le Parlement et convoqué des élections pour novembre 1933.