Les Cortes de Cadix et la Constitution de 1812

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En 1808, l'Espagne a été envahie par la France, ce qui a entraîné la guerre d'Indépendance, qui a duré jusqu'en 1813, lors de la signature du traité de Valençay. Dans ce contexte, Napoléon Bonaparte a obtenu l'abdication de la monarchie espagnole à Bayonne et, par un décret impérial, a nommé son frère Joseph Ier roi d'Espagne et des Indes, une décision qui ne fut pas acceptée par le peuple espagnol.

Les Cortes de Cadix

Des conseils provinciaux ont émergé pour gouverner la résistance contre les Français. Les conseils de Séville et de Grenade, avec le général Brown, ont remporté la victoire de Bailén. À Aranjuez, le Conseil central a été créé, résultant de l'unification des provinces. Ce gouvernement, à caractère réformateur, a déménagé à Séville, mais l'invasion de l'Andalousie par les Français a contraint la Junte à se retirer à Cadix. Elle fut dissoute et fit place à un Conseil de régence, qui prévoyait la réunion du Parlement en une seule chambre, sans distinction de classes. Étant donné la difficulté d'avoir des membres de toutes les régions du pays, Cadix a désigné des suppléants. Cette région, à l'esprit réformateur, a ainsi influencé la chambre. Le 24 septembre 1810, la première session s'est tenue à San Fernando, avant de déménager à Cadix. Parmi les membres, trois groupes se distinguaient :

  • Les Absolutistes : défendant la souveraineté absolue d'origine divine et une participation populaire uniquement consultative. Ils étaient soutenus par les classes privilégiées et, paradoxalement, certains secteurs populaires.
  • Les Réformistes : partisans de réformes inspirées des Lumières.
  • Les Libéraux : défenseurs d'une transformation profonde de l'Ancien Régime sur les plans politique, économique et social, revendiquant des droits tels que la liberté, l'égalité, la propriété... Ils étaient soutenus par la bourgeoisie, le clergé et une partie des professions libérales.

La domination idéologique des libéraux a conduit à l'existence d'un décalage entre les Cortes et le reste du pays. Peu après, une Assemblée nationale fut réunie.

La Constitution de 1812

Les travaux des Cortes constituantes de Cadix ont abouti à l'approbation, le 19 mars 1812, de la Constitution, inspirée par la première constitution française. Elle ne reconnaissait pas l'abdication de Bayonne et était très étendue : 10 titres et 384 articles. Les Cortes craignaient que la législation ultérieure ne l'inverse, c'est pourquoi de nombreux articles étaient détaillés et il fallait huit ans pour la modifier. Elle ne reflétait pas la réalité de l'Espagne, qui n'était pas un pays libéral. Cette Constitution est comparable à celle des États-Unis de 1787 ou à celle de la France de 1791. Voici ses principaux points :

  • Reconnaissance de la souveraineté nationale.
  • Établissement de l'égalité entre la métropole et les territoires américains.
  • Mise en place d'une monarchie constitutionnelle.
  • Division des pouvoirs :
    • Existence d'un Parlement monocaméral, élu au suffrage universel masculin indirect (les électeurs votaient pour des délégués qui élisaient ensuite les députés) et réservé aux hommes de plus de 25 ans. Ce Parlement constituait le pouvoir législatif.
    • Le monarque détenait le pouvoir exécutif, dirigeait le gouvernement, pouvait suspendre l'entrée en vigueur des lois, et ses actions devaient être contresignées par les ministres.
    • Le pouvoir judiciaire résidait dans les tribunaux, qui jouissaient d'une indépendance.
  • Reconnaissance des tribunaux ecclésiastiques et militaires.
  • Approbation d'un énoncé général des droits et libertés : égalité devant la loi, procédure régulière, liberté de la presse et droit à l'éducation.
  • Caractère confessionnel de l'État, considérant la religion catholique comme la seule vraie et interdisant les autres cultes.

La vigueur de cette Constitution s'est exercée comme suit :

  • Entre 1812 et 1814, pendant la guerre d'Indépendance.
  • De 1820 à 1823, durant le Triennat libéral.
  • Entre 1836 et 1837, sous la régence de María Cristina de Borbón.

Autres lois et réformes

En plus de l'approbation de la Constitution de 1812, les Cortes ont adopté une série de mesures législatives, d'ordre :

  • Politique : suppression des secrétariats d'État, création de ministères et nouvelle division administrative de l'Espagne.
  • Religieux : abolition de l'Inquisition.
  • Social : liberté du travail, abolition des corporations, des privilèges et des juridictions seigneuriales, élimination de la torture, promotion de l'agriculture et de l'élevage.
  • Économique : saisie et vente des biens des Jésuites, des ordres militaires, de l'Inquisition et des terres de la Couronne, afin de rembourser l'important déficit de la dette publique.

Le travail législatif des Cortes de Cadix a eu peu d'effet immédiat car, après le traité de Valençay, Ferdinand VII est retourné en Espagne et l'a abolie, restaurant l'absolutisme par le décret de Valence. Toutefois, son impact fut considérable, car certaines règles ne purent plus être entièrement abrogées pour revenir à l'Ancien Régime. Par ailleurs, la Constitution de 1812 est devenue un symbole du libéralisme et un modèle pour de nombreuses constitutions européennes et toutes les constitutions hispano-américaines.

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