Les Cortès: Pouvoir, Rôle et Composition

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Les Cortès: Pouvoir et Rôle Historique

Débat sur le pouvoir législatif

Le partage du pouvoir législatif était également débattu. Certains monarques, ainsi qu'un juge du Conseil, estimaient que ce n'était pas par ce moyen que la justice cesserait d'être une fonction spécifique du pouvoir royal. Concernant ce dernier point, la réplique de Pérez Prendergast ajoutait que si des circonstances, purement circonstancielles ou politiques, avaient amené la Cour à limiter le pouvoir du roi, cela prouverait que la loi ne détenait pas une telle autorité.

L'argument de ce brillant auteur allait trop loin. Entre sa thèse et l'autre tendance doctrinale, il y avait encore place pour une interprétation intermédiaire. Les Cortès de Castille étaient plus que la première et moins que la seconde : un ensemble dont la justification était souvent de légitimer les décisions unilatérales du monarque par consensus. Cependant, par la force des circonstances, la nécessaire harmonie politique et sociale en a fait, en réalité, un corps qui, avec une force plus ou moins grande selon les époques, limitait et modérait l'absolutisme royal.

Fonctions et Représentation

Représentation du royaume

Les Cortès représentent le royaume. Cela signifie que si plusieurs royaumes ou d'autres unités territoriales de nature juridique différente faisaient partie des États de la Couronne, chacun conservait sa propre assemblée. Ce principe a été strictement suivi dans la Couronne d'Aragon, où la Catalogne, Valence et l'Aragon avaient leurs propres Cortès distincts, et les territoires d'outre-mer de Sicile et de Sardaigne, leurs parlements spécifiques. Dans la Couronne de Castille, la politique fut oscillante jusqu'au milieu du XIVe siècle, réunissant les Cortès de León et de Castille en une ou deux chambres. Depuis lors, il n'y eut plus que des Cortès uniques, mais les Basques conservèrent leurs propres Juntes Générales. La Navarre avait des Cortès du royaume durant la période médiévale et les maintint après son incorporation à la Castille.

Compétences principales

Leur compétence se limitait aux questions d'intérêt général, mais leurs responsabilités spécifiques n'ont jamais été explicitement reconnues. Au-delà des fonctions génériques et diffuses, comme conseiller le monarque, défendre la justice et la paix, ou se réunir à l'occasion du serment du roi et de l'héritier, leur champ d'action se concentrait essentiellement sur trois points :

  • L'octroi de subsides extraordinaires (aides financières)
  • La présentation des griefs
  • L'intervention dans le processus législatif
Octroi des subsides et réparation des torts

L'octroi de l'aide financière demandée par le roi et l'accord sur de nouvelles taxes étaient des questions relevant de la compétence exclusive des Cortès, ou leur fonction essentielle, selon Sánchez Albornoz. Cependant, alors qu'en Castille il était habituel d'accorder le subside (servicio) avant que le roi ne réponde aux pétitions des procureurs ou ne répare les torts (agravios), en Aragon, la procédure était inversée. Cela signifiait que l'octroi des subsides était conditionné à la réparation préalable des abus (contrafueros). Une telle différence était cruciale pour le jeu politique de l'une et l'autre assemblée. En Aragon, il arrivait parfois que l'on refuse catégoriquement d'accorder le subside, si bien que le roi préférait clore les Cortès sans répondre aux plaintes. La discussion du subside était également très approfondie, l'accord sur ces questions monopolisant une grande partie de la durée des Cortès. En Castille, cependant, les rois obtenaient le subside assez facilement, et souvent les Cortès se séparaient sans que leurs demandes aient été satisfaites, ce qui explique la récurrence de ces pétitions non satisfaites lors de réunions ultérieures.

L'activité législative

L'activité législative se déroulait devant les Cortès, mais leur poids différait entre la Castille et l'Aragon. Nous avons déjà souligné précédemment le caractère problématique des Cortès de Castille, où l'appréciation du degré de participation qui leur était conféré pour légiférer avec le roi joue un rôle important. Dans tous les cas, que l'on comprenne que le roi et les Cortès légiféraient d'un commun accord ou que le roi ne partageait pas le pouvoir législatif, il est vrai que ce pouvoir était exercé en Castille par les Cortès elles-mêmes. En Aragon, les pouvoirs législatifs de l'Assemblée étaient un peu plus explicites, comme en témoigne la reconnaissance du Privilège Général de 1283.

L'image d'un front uni des Cortès aragonaises face au monarque est plus que problématique.

Composition et Fonctionnement des Cortès

Représentation des trois états

L'état nobiliaire et l'état ecclésiastique

L'état nobiliaire (ou bras nobiliaire) était généralement constitué d'un seul corps, sauf en Aragon, où il apparaissait divisé en deux. Ainsi, contrairement aux Cortès des autres royaumes, habituellement composées de trois bras (ou états), celles d'Aragon en comptaient quatre.

Les deux bras de la noblesse aragonaise étaient celui des ricos hombres (haute noblesse) et celui des chevaliers et hidalgos (petite noblesse). On connaît la raison de cette double représentation. Pierre IV voulut transférer ce modèle aux Cortès de Valence et de Catalogne, ce qui ne fut réalisé que dans ces dernières et pour quelques années seulement (de 1388 à 1405), où siégèrent d'une part les barons et d'autre part les cavallers de la noblesse inférieure. À l'exception de cet épisode, le régime des deux bras nobiliaires en Aragon était unique.

L'état ecclésiastique était représenté par des personnalités éminentes : évêques, abbés, prieurs de monastères importants, qui y assistaient en personne ou envoyaient un procureur en leur nom. Parfois, selon les territoires, ce bras incluait les maîtres des ordres militaires et les procureurs des ordres mendiants. Le rôle du clergé fut moins important en Aragon, où l'on note son dévouement quasi exclusif aux affaires de l'Église ou à la défense de ses propres intérêts, au détriment d'autres problèmes.

Déclin de la participation nobiliaire et ecclésiastique

Nobles et clergé cessèrent progressivement d'assister aux Cortès ; l'absence de ces deux bras était déjà évidente dans la seconde moitié du XVe siècle et devint absolue à partir de 1538. À partir de cette date, les réunions ne se tinrent plus qu'avec les représentants des villes.

Le Tiers État (ou bras royal)

Le troisième bras était constitué par les procureurs des cités et des villes, mais pas de toutes, seulement de celles qui étaient convoquées par le roi parmi les territoires de la Couronne (realengo). Les villes de seigneurie (señorío) étaient représentées par leurs seigneurs laïcs ou ecclésiastiques.

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