Le coup d'État de Primo de Rivera en 1923 : contexte et motivations

Classified in Histoire

Written at on français with a size of 8,05 KB.

La crise de l'été 1917 et la chute du régime constitutionnel

Le gouvernement de coalition de 1918 et ses conséquences

L'échec du gouvernement de coalition de 1918 à réformer le système, contenir l'inflation et restaurer l'ordre social a marqué le début d'une période d'instabilité (1919-1923). Cinq années de gouvernements conservateurs majoritaires (neuf au total) ont été caractérisées par un conflit social intense, la suspension des garanties constitutionnelles, l'intervention de l'armée dans la vie politique, le renforcement des mouvements ouvriers, les révoltes paysannes en Toscane (triennat bolchevique) et, surtout, la montée de la violence politique, illustrée par l'assassinat du Premier ministre Dato en 1921.

La catastrophe de la notice annuelle et la montée du Picasso AR

Dans ce contexte, la catastrophe de la notice annuelle (juillet 1921) et le développement du Picasso AR, vivement débattus au Parlement et rejetés par l'armée, ont précipité les événements. Le coup d'État est apparu à certains comme la seule solution, comme l'indique Primo de Rivera dans le manifeste analysé ici.

La dictature de Primo de Rivera (1923-1929)

L'annuaire militaire (1923-1925)

Sous la dictature de Primo de Rivera, deux étapes se distinguent : l'annuaire militaire (1923-1925) et le gouvernement civil (1925-1929). Le manifeste du coup d'État, dont un extrait est analysé ici, expose le programme du dictateur. Primo de Rivera proclame l'état de guerre pour deux ans, suspend la Constitution de 1876, dissout le Parlement, instaure la censure de la presse et interdit les activités des partis politiques et syndicats. La politique est militarisée, avec une répression sévère contre la CNT et le PCE, déclarés illégaux. Toute manifestation nationaliste est supprimée, et l'usage des symboles et de la langue catalane est interdit.

La réforme administrative et la centralisation du pouvoir

Le principal projet de Primo de Rivera est de liquider les structures du pouvoir issues de la Restauration et de réformer l'administration. Les gouverneurs provinciaux sont remplacés par des militaires, et un nouveau corps de représentants du gouvernement est créé. L'armée contrôle également les municipalités, constituées après l'approbation du Statut municipal (1924) par des conseils de « membres associés » élus par les principaux contributeurs. Cette réforme aboutit à une administration centralisée et dépendante du pouvoir central. En Catalogne, les municipalités et les conseils de comté sont confiés à des fidèles du régime. Avec la réglementation provinciale (1925), la Mancomunitat disparaît, marquant une rupture définitive avec les conservateurs de la Lliga Regionalista et renforçant le nationalisme radical, voire le séparatisme.

La question du Maroc

Primo de Rivera prend personnellement en charge le haut-commissariat au Maroc et cherche une solution négociée. Cependant, l'attaque des troupes espagnoles à Chefchaouen en 1924 (2 000 morts) et les avancées d'Abd-el-Krim au Maroc français le font changer d'approche. En 1925, la France et l'Espagne lancent une offensive conjointe. Le débarquement d'Alhucemas est un succès pour les troupes espagnoles.

Le gouvernement civil (1925-1929)

À partir de 1925, Primo de Rivera remplace le Conseil militaire par un gouvernement civil, affichant sa volonté de se maintenir au pouvoir. Le régime s'institutionnalise autour de deux piliers : l'Assemblée nationale consultative et une politique économique interventionniste.

L'Assemblée nationale consultative et le Statut fondamental de la monarchie

En 1926, Primo de Rivera annonce la convocation d'une Assemblée nationale consultative chargée de rédiger une nouvelle constitution. L'assemblée, réunie en 1927, est composée de représentants de l'État, des différents niveaux de gouvernement, de l'Union patriotique (parti au pouvoir) et des différentes classes économiques et sociales. Deux tiers de ses 400 membres sont nommés par le gouvernement. L'opposition des vieux partis dynastiques, le refus des socialistes de participer et les réticences du roi paralysent le projet de Statut fondamental de la monarchie.

Politique économique interventionniste et nationalisme économique

La politique économique de la dictature, favorisée par l'expansion internationale, est marquée par l'intervention de l'État et le nationalisme économique. L'objectif est de réglementer et de promouvoir l'industrie nationale par des tarifs protectionnistes, des aides aux grandes entreprises et l'augmentation des dépenses publiques (construction de barrages, de routes (2 800 km), de chemins de fer et de ports). Des monopoles étatiques sont créés, comme la CAMPSA (Compañía Arrendataria del Monopolio de Petróleos, S.A.) et la Compañía Telefónica Nacional de España. Cette politique de dépenses publiques, non accompagnée d'une réforme fiscale, creuse le déficit budgétaire et entraîne une émission constante de dette publique.

Politique sociale et organisation corporatiste

Malgré la répression, notamment contre les anarchistes, l'agitation sociale reste faible grâce au développement d'une politique sociale (logements sociaux, écoles, services de santé) et à un nouveau modèle de relations professionnelles basé sur l'intervention de l'État et l'intégration des syndicats réformistes. L'Organisation corporative nationale repose sur des « comités mixtes » composés d'un nombre égal de représentants des travailleurs et des employeurs. Contrairement au système italien, la liberté d'association est reconnue. Les comités ont pour mission de résoudre les conflits par la négociation et ont autorité sur les questions de travail (réglementation du travail, contrats, assistance sociale). Les socialistes jugent ce système avantageux pour maintenir et consolider le parti et le syndicat.

L'opposition au régime

L'opposition au régime se structure autour de plusieurs acteurs : l'armée (mécontente de la règle de promotion à l'ancienneté stricte), les partis républicains, certains militaires conspirateurs (coup d'État de Sanjuanada en 1926), des intellectuels (Unamuno, Ortega y Gasset), des journalistes, des anarchistes, le PSOE et les nationalistes. Le consensus initial des conservateurs se fissure, et Primo de Rivera peine à trouver une sortie constitutionnelle. Les difficultés économiques s'intensifient (dévaluation de la peseta, augmentation de la dette publique).

La chute de la dictature et la fin de la monarchie

Craignant que le prestige croissant de la dictature ne nuise à la monarchie, Alphonse XIII décide de destituer Primo de Rivera, qui démissionne le 28 janvier 1930. Le général Dámaso Berenguer est chargé de former un gouvernement et de restaurer la normalité constitutionnelle. Cependant, la méfiance des anciens partis dynastiques envers le roi et la montée du républicanisme rendent impossible un retour au régime de 1876. En août 1930, les partis républicains et les nationalistes catalans et galiciens signent le Pacte de San Sebastián pour proclamer la République. Les socialistes rejoignent le pacte en octobre. Un comité révolutionnaire prépare le changement de régime par un soulèvement militaire soutenu par des civils. Des intellectuels publient le manifeste fondateur de l'Association au service de la République.

Note

Ce texte est un extrait du manifeste du coup d'État du 13 septembre 1923 de Miguel Primo de Rivera. Il expose les griefs et les objectifs du nouveau régime, avec une ambition de régénération.

Entradas relacionadas: