La Crise du Droit au XVIe Siècle : Méthodes et Évolutions

Classé dans Sciences humaines et sociales

Écrit le en français avec une taille de 6,54 KB

La Crise du XVIe Siècle et ses Implications Méthodologiques

Émergence d'une Nouvelle Législation

Le XIVe siècle, qui représente l'apogée de l'activité théorique des commentateurs, est le moment où les iura propria (droits propres) sont pleinement intégrés dans le ius commune romano-justinien. La science juridique cherche alors à réduire cette masse à une unité logique. L'évolution sociale et le progrès du mouvement de centralisation du pouvoir politique, tout en changeant l'équilibre du système des sources du droit, préparent la création d'une suprématie ouverte du droit des royaumes ou des villes sur le ius commune, préparée par les juristes du XIVe siècle.

Ceci s'applique en droit public, droit pénal et droit commercial. Si, dans le premier cas (droit public), il a été possible de trouver un parallèle avec l'organisation de la puissance de l'Empire romain contenue dans les trois derniers livres du Code de Justinien, cela n'a pas été le cas en droit pénal et en droit commercial.

Mais l'abandon des principes de la doctrine civiliste romaine dans ces domaines particuliers est le reflet d'une plus large présentation du droit commun sur la base romano-canonique de la nouvelle loi nationale, dont la codification est en cours et que la centralisation du pouvoir royal renforce.

En France, la rédaction des coutumes est ordonnée par Charles VII, Louis XI et Henri III. En Espagne, une codification de la coutume, ordonnée par la reine Isabelle, apparaît en 1484, tandis que la collecte de la législation royale est réalisée en 1657.

En Allemagne, le duc Guillaume IV de Bavière réalise la collection des principales sources du droit bavarois tout en unifiant le processus législatif et en répondant aux besoins ducaux dans les domaines administratif et économique.

Désormais, ces compilations ont relégué le droit commun au second plan.

Tout l'effort d'interprétation subtile de la législation, nécessaire à la modernisation du droit romain, a cessé d'avoir effet face aux dispositions modernes et aux nouvelles chartes. Le discours sur l'inadéquation du droit romain a pris de l'ampleur à mesure que la loi s'en éloignait progressivement.

Dès lors, l'orientation de la doctrine fut triple :

  • Un courant (le gallicus mos) considérait le droit romain justinien comme n'ayant d'intérêt que d'un point de vue historique et philologique. Il refusait, implicitement ou explicitement, son caractère de droit positif, tout en cherchant à le libérer du joug des interprétations successives pour en retrouver la pureté classique.
  • Un autre courant s'est consacré à intégrer ces nouvelles réalités dans les cadres conceptuels des commentateurs, jugés insuffisants pour le nouveau matériel, et a fourni de nouvelles figures théoriques. C'est l'*usus modernus Pandectarum* (l'utilisation moderne des Pandectes ou Digest), qui réécrit et complète le système de droit développé par les commentateurs.

Si l'humanisme juridique (gallicus mos) prévalait en France, l'orientation de l'*usus modernus Pandectarum* correspond à une prédominance allemande.

Dans le domaine du droit civil, la doctrine civiliste, reposant presque exclusivement sur le droit romain, a maintenu et développé les connaissances juridiques des commentateurs, bien que ce travail poursuive, désormais en vain, sa méthodologie scientifique. C'est « la fin de Bartole », qui, dans le sud de l'Europe, voit la doctrine civiliste se poursuivre jusqu'au XVIIIe siècle.

Développement Interne du Système Juridique

Les connaissances juridiques des commentateurs ont initié une logique d'unification interne du droit, réalisée en utilisant la dialectique aristotélicienne et scolastique.

La dogmatique avait révélé les grands principes et la structure des différents domaines du droit, ainsi que, pour chaque école, le sens juridique des termes techniques, etc. Par conséquent, l'étape suivante dans l'œuvre d'unification scientifique du droit : la construction de « systèmes » juridiques généraux, structurés sur les principes obtenus. Si les commentateurs avaient procédé par une analyse patiente de textes isolés, il est maintenant possible de réaliser une synthèse, par laquelle toutes les règles de droit peuvent être réunies dans un système théorique sous forme d'axiomes et de règles organiques. Le modèle du Digest est remplacé par le modèle des Institutes.

S'ouvre l'ère du droit naturel rationaliste, qui soutient que les principes supérieurs du droit sont un produit de la raison et révèlent un ordre universel. La pensée juridique ne se contente plus de découvrir des règles dans les textes, mais construit activement un système basé sur la raison, même si ce travail est influencé par les sources et les intentions normatives de l'époque.

Ce stade de construction systématique du droit entraîne un remodelage des outils logiques et conceptuels disponibles, orienté vers la simplification, car les subtilités de la science juridique des commentateurs, bien que nécessaires en leur temps, sont devenues oppressantes et inconfortables.

Maintenant que le travail complexe des commentateurs n'était plus indispensable, il est devenu possible de revenir à des procédés plus simples et naturels. Cela conduit le discours juridique du XVIe siècle à proposer le rejet de la dialectique aristotélicienne et scolastique compliquée et l'adoption d'une dialectique juridique simplifiée, naturelle, proche du bon sens. Ainsi, un juriste allemand du milieu du XVIe siècle invitait à aborder les problèmes d'une manière « populaire », accessible à la population.

À mesure que la stabilisation du système conceptuel progressait et que les arguments complexes des commentateurs étaient remplacés par d'autres limitant davantage la liberté de l'interprète, il est devenu possible de se passer du rôle disciplinaire que la « communis opinio doctorum » (l'opinion commune des docteurs) avait joué jusque-là.

La tâche de trouver une solution juridique était désormais assurée par l'ensemble des axiomes du système juridique, logiquement enchaînés. La possibilité d'hésiter entre des principes contradictoires, si commune dans le système encore incomplet des commentateurs et qui empêchait la sécurité dans la recherche de solutions juridiques, n'existe plus, car les règles de droit sont unifiées dans un système logique sans contradictions conceptuelles.

Entrées associées :