Déclaration des Droits de la Terre-Mère

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Déclaration des Droits de la Terre-Mère : Un Avenir Commun

Miguel D'Escoto, Leonardo Boff et al.

Préambule

ATTENDU QUE la Terre et l'humanité font partie d'un vaste univers en évolution, partageant un destin commun, menacé de destruction par l'irresponsabilité et la négligence des êtres humains, et que la Terre et l'humanité forment une entité unique, complexe et sacrée, comme il ressort clairement vu de l'espace ; et, qu'en outre, la Terre est vivante et se comporte comme un système unique d'autorégulation composé d'éléments physiques, chimiques, biologiques et humains qui sont propices à la production et à la reproduction de la vie, et que c'est notre Grande Mère et notre maison commune.

Considérant que la Terre-Mère est composée de tous les écosystèmes dans lesquels est générée une grande variété de formes de vie, toutes interdépendantes et complémentaires, constituant la plus grande communauté de vie; et qu'il existe un lien de parenté entre tous les êtres humains, car ils portent tous le même code génétique de base qui établit l'unité sacrée de la vie sous ses multiples formes et que, par conséquent, l'humanité fait partie de la communauté de vie et est le moment de la conscience et de l'intelligence de la Terre elle-même, s'assurant que l'être humain, homme et femme, "est la Terre elle-même qui parle, pense, ressent, aime, prend soin et vénère".

ATTENDU QUE tous les êtres humains, avec leurs cultures, langues, traditions, religions, arts et visions du monde, constituent une seule famille de frères et sœurs, égaux en dignité et en droits; et que la Terre-Mère fournit tout ce dont nous avons besoin pour vivre, et que la vie naturelle et humaine dépend d'une biosphère saine avec tous ses écosystèmes durables, son eau, ses forêts, ses animaux et ses micro-organismes innombrables préservés; et, qu'en outre, l'augmentation du réchauffement climatique pourrait menacer la vitalité et l'intégrité du système Terre et entraîner de graves dégâts qui toucheraient des millions de personnes et, éventuellement, faire dérailler la survie de l'humanité tout entière.

N'OUBLIONS PAS de renouveler le contrat naturel et organique avec le contrat social qui a acquis un rôle exclusif et a conduit à l'anthropocentrisme et aux stratégies établies d'appropriation et de domination de la nature et de la Terre-Mère, car le mode de production existant depuis le siècle dernier et aujourd'hui globalisé ne répond pas aux besoins vitaux du peuple, créant au contraire un fossé profond entre riches et pauvres.

Considérant, enfin, que la conscience de la gravité de la situation de la Terre et de l'Humanité apporte les changements nécessaires dans les esprits et les cœurs, et permet de forger une coalition de forces autour de valeurs communes et de principes qui servent de source d'inspiration, de fondements éthiques et d'encouragement pratique pour rechercher un mode de vie durable. Les particuliers, les institutions, les dirigeants politiques, les ONG, les religions et les églises qui souscrivent à cette déclaration reconnaissent le besoin urgent de proclamer cette Déclaration Universelle du Bien Commun de la Terre et de l'Humanité, dont les idéaux et les critères doivent guider les peuples, les nations et les citoyens dans leurs pratiques de groupe, communautaires et personnelles, et dans l'éducation pour le bien commun, afin qu'elle soit de plus en plus reconnue, respectée, observée, universellement acceptée et encouragée en vue de la bonne vie de chacun et de tous les résidents de cette petite planète bleue-blanche, notre maison commune.

Article 1

Le bien commun suprême et universel, condition de tous les autres biens, est la Terre elle-même qui, en tant que notre Grande Mère, doit être aimée, soignée, régénérée et honorée comme nos propres mères.

  1. Le bien commun de la Terre et de l'humanité exige que nous comprenions la Terre comme une entité vivante et digne. Elle ne peut être affectée individuellement par quiconque, ni faire l'objet d'agressions systématiques par aucun mode de production. Elle appartient collectivement à tous ceux qui vivent et à tous les écosystèmes.
  2. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité nécessite de protéger et de restaurer l'intégrité des écosystèmes, avec une préoccupation particulière pour la diversité biologique et les processus naturels qui entretiennent la vie.
  3. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité est renforcé lorsque tous les êtres sont considérés comme interconnectés et ayant une valeur intrinsèque, indépendamment de leur utilisation par l'homme.

Article 2

Afin d'assurer le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité, il est nécessaire de réduire, réutiliser et recycler les matériaux utilisés dans la production et la consommation, afin de garantir que les déchets puissent être assimilés par les systèmes écologiques, et de rechercher la bonne vie en prenant soin des écosystèmes, en coopération avec les autres et en harmonie avec les rythmes de la nature.

  1. Le bien commun de la Terre et de l'humanité est l'utilisation durable des biens renouvelables comme l'eau, le sol, les produits forestiers et la vie marine, de sorte qu'ils puissent être reconstitués et garantis pour les générations actuelles et futures.
  2. La gestion des ressources non renouvelables, comme les minéraux et les combustibles fossiles, doit être faite de telle sorte qu'elle réduise leur extinction et n'endommage pas gravement le bien commun de la Terre et de l'humanité.

Article 3

Adopter des modes de production et de consommation qui assurent la vitalité et l'intégrité de la Terre-Mère, l'équité sociale de l'humanité, la consommation responsable et solidaire, et la bonne vie en communauté.

  1. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité exige l'utilisation durable des sources d'énergie disponibles, en donnant la priorité aux énergies renouvelables propres et alternatives comme le solaire, l'éolien, le marémoteur et l'agroénergie.
  2. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité est renforcé lorsque l'on réduit au maximum la pollution de tout élément de l'environnement, de manière à éviter les effets néfastes du réchauffement de la planète et à ne pas permettre l'augmentation des substances radioactives, toxiques et autres produits chimiques dangereux.
  3. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité n'est pas compatible avec l'existence d'armes nucléaires, biologiques et chimiques, et autres armes de destruction massive, qui doivent être complètement éliminées.

Article 4

La biosphère est un bien commun de la Terre et de l'humanité, et un patrimoine partagé par toutes les formes de vie dont les êtres humains sont les gardiens.

Article 5

Appartiennent au bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité les ressources naturelles telles que l'air, les sols, la fertilité, la flore, la faune, les gènes, les micro-organismes, les échantillons représentatifs des écosystèmes naturels et l'espace.

  1. L'eau appartient au bien commun de la Terre et de l'humanité parce que c'est un élément naturel, commun, vital et indispensable pour tous les êtres vivants, en particulier les humains qui ont le droit d'y accéder, quel que soit le coût de la collecte, de la réservation, de la purification et de la distribution, qui sera couvert par le gouvernement et la société.
  2. Les océans sont un bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité parce qu'ils sont les grands dépôts de la vie, les régulateurs du climat et la base physique et chimique de la Terre.
  3. Les forêts appartiennent au bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité; elles abritent la plus grande biodiversité de la planète, captent l'eau des précipitations et séquestrent une part importante du dioxyde de carbone.
  4. Les climats appartiennent au bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité, car ils sont essentiels pour le maintien de la vie, et le changement climatique doit être abordé globalement et avec une responsabilité partagée.

Article 6

Appartiennent au bien commun de l'humanité la diversité des aliments de la Terre et les ressources phytogénétiques et génétiques nécessaires à leur production; toute spéculation commerciale sur ces ressources est interdite.

Article 7

Sont des biens publics de l'humanité l'énergie nécessaire à la vie, la santé et l'éducation, les médias, l'Internet, les services postaux et les transports publics. Les médicaments produits par des laboratoires privés, après cinq ans, doivent passer au bien commun de l'humanité et, en cas d'urgence, peuvent être rendus publics immédiatement.

Article 8

L'exploitation pétrolière, minière et agro-carburant doit être soumise à un contrôle étatique et social en raison des effets néfastes qu'elle peut avoir sur le bien commun de l'humanité et de la Terre-Mère.

Article 9

Le grand bien commun de la Terre et de l'humanité, ce sont les êtres humains, hommes et femmes, porteurs de dignité, de conscience, d'intelligence, d'amour, de solidarité et de responsabilité.

  1. Nous devons affirmer la dignité inhérente à tous les êtres humains et leurs capacités intellectuelles, artistiques, éthiques et spirituelles.
  2. La mission de l'être humain est de nourrir et de protéger la Terre et l'humanité en tant qu'héritages de l'univers.
  3. Les communautés, à tous les niveaux, sont nécessaires pour assurer la réalisation des droits et des libertés fondamentales, créer les conditions pour que chaque personne puisse réaliser son plein potentiel et contribuer au bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité.

Article 10

Appartient au bien commun de la Terre et de l'humanité toute connaissance, arts et techniques accumulés tout au long de l'histoire.

  1. Le bien commun de la Terre et de l'Humanité exige la reconnaissance et la préservation des savoirs traditionnels et de la sagesse spirituelle de toutes les cultures qui contribuent à prendre soin de la Terre, à développer le potentiel de l'humanité et à promouvoir le bien commun.
  2. Le bien commun de l'humanité demande une aide financière, technique, sociale et intellectuelle aux populations pauvres et vulnérables, afin de garantir un mode de vie durable et de travailler au bien commun.
  3. Le bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité exige l'éradication de la pauvreté comme un impératif humanitaire, éthique, social, environnemental et spirituel.
  4. La justice sociale et écologique ne peut être dissociée parce que les deux servent le bien commun de la Terre et de l'humanité.
  5. Appartient au bien commun de la Terre et de l'humanité l'égalité des sexes, l'élimination de toutes les formes de discrimination, la protection des enfants contre la violence et la sécurité sociale de tous ceux qui ne peuvent pas subvenir à leurs propres besoins.

Article 11

Appartiennent au bien commun de la Terre et de l'humanité toutes les formes de gouvernement qui respectent les droits de chaque être humain et de la Terre-Mère, et favorisent la participation active et inclusive des citoyens au processus décisionnel, promeuvent l'accès ouvert à la justice et la protection de l'environnement.

Article 12

Le bien commun de la Terre et de l'humanité exige que soient protégées les réserves naturelles, y compris les terres sauvages et les aires marines, les moyens d'existence de la vie sur Terre, les semences, la biodiversité, et que soient sauvées les espèces en péril et les écosystèmes dévastés.

  1. Contrôler l'introduction d'espèces exotiques et soumettre strictement au principe de prévention tous les organismes génétiquement modifiés qui pourraient nuire aux espèces indigènes et à la santé de la Terre-Mère et de l'Humanité.
  2. Veiller à ce que la connaissance des différents domaines, essentielle pour le bien commun de la Terre et de l'humanité, soit considérée comme du domaine public.
  3. Il est interdit de breveter les ressources génétiques fondamentales pour l'alimentation et l'agriculture, et la propriété des découvertes techniques doit toujours conserver sa destination sociale.

Article 13

Appartiennent au bien commun de l'humanité les nombreuses cultures de la Terre-Mère, les langues, les différents peuples, les monuments, l'art, la musique, les sciences, les techniques, les philosophies, la sagesse, les traditions éthiques, les voies spirituelles et les religions.

Article 14

Appartient au bien commun de la Terre et de l'humanité l'hospitalité de la vie, par laquelle nous nous accueillons les uns les autres en tant qu'habitants de la maison commune, la Terre.

Article 15

Appartient au bien commun de l'humanité et de la Terre-Mère la socialité et la coexistence pacifique avec tous les êtres humains et la nature, parce que nous sommes tous fils et filles de la Terre-Mère et sommes les gardiens d'un même destin commun.

Article 16

Appartient au bien commun de l'humanité l'accueil et la tolérance des différences en tant qu'expressions de la richesse de la nature humaine, et l'interdiction que de telles différences soient considérées comme des inégalités.

Article 17

Appartient au bien commun de l'humanité la *commensalité*, exprimant le rêve ancien de tous les peuples de s'asseoir ensemble comme des frères et sœurs d'une même famille autour de la table, mangeant et buvant avec joie le fruit de la générosité de la Terre-Mère.

Article 18

Appartient au bien commun de l'humanité la compassion pour tous ceux qui souffrent dans la nature et dans la société, le soulagement de leurs souffrances et la prévention de toute forme de cruauté envers les animaux.

Article 19

Appartiennent au bien commun de l'humanité les principes éthiques de respect de chaque personne, de soin de la nature et de responsabilité universelle pour la préservation de la biodiversité et la continuité du projet planétaire de l'homme, ainsi que les principes de coopération et de solidarité, en commençant par les plus démunis, afin que tous soient inclus dans la maison commune.

Article 20

Appartient au bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité la recherche constante de la paix, qui est la bonne relation avec soi-même, avec le Tout, avec la nature, avec la vie, avec la société nationale et internationale, et avec le grand Tout dont nous faisons partie.

Article 21

Appartient au bien commun de l'humanité et de la Terre-Mère la reconnaissance de l'énergie d'amour qui sous-tend tout l'univers, qui imprègne chacun des êtres et qui peut être invoquée, accueillie et vénérée.

Article 22

Tous ces idéaux et normes du bien commun de la Terre-Mère et de l'humanité étendent et renforcent les droits de l'homme énoncés dans la Déclaration des Droits de l'Homme, proclamée le 10 décembre 1948 par l'Assemblée des Nations Unies, qui doit maintenant être enrichie des droits de la Terre-Mère et de l'Humanité.

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