Ethnocentrisme et Relativisme Culturel : Une Analyse Critique
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La comparaison des cultures et l'ethnocentrisme
Il importe d'être conscient du fait que l'usage même de la notion de culture peut servir à dévaloriser des modes de vie qui s'opposent à ceux de la culture à laquelle on appartient. C'est pour cette raison que la comparaison des cultures est un exercice extrêmement délicat.
En effet, le fait de comparer suppose que l'on prenne un étalon à partir duquel on effectue la comparaison. Ainsi, un modèle de culture est toujours choisi, et on évalue les autres cultures en fonction de ce modèle. De là naît le risque d'ériger en normes des pratiques particulières à partir desquelles évaluer les autres cultures. Autrement dit, comparer les cultures peut se réduire à universaliser des habitudes acquises par une culture particulière au détriment des autres.
C'est cette difficulté majeure que l'ethnologue Claude Lévi-Strauss a mise en lumière à travers le concept d'ethnocentrisme.
Qu'est-ce que l'ethnocentrisme ?
L'ethnocentrisme est la tendance, pour une culture donnée, à considérer ses normes et ses pratiques comme la mesure et le modèle pour comprendre toutes les autres cultures. Cette tendance amène à rejeter les autres formes de cultures, ou à les considérer comme inférieures à la sienne.
L'ethnocentrisme est la « tendance, plus ou moins consciente, à privilégier les valeurs et les formes culturelles du groupe ethnique auquel on appartient ».
C'est ainsi que l'Occident a généralement pris son modèle d'évolution historique de la culture pour évaluer les autres cultures du monde. Lévi-Strauss souligne que ce que l'on évalue alors n'est pas une évolution, mais simplement un changement par rapport à sa propre culture. Autrement dit, ce qui apparaîtra comme un changement à un individu donné pourra apparaître comme une stagnation à un autre, car chacun voit le changement en fonction des critères propres à la culture à laquelle il appartient.
Le relativisme culturel
La difficulté de comparer les cultures, et plus largement d'utiliser, pour les étudier, des modes de pensée qui leur sont étrangers, a des effets sur l'appréhension des cultures. En réaction à l'ethnocentrisme s'est formé ce que l'on nomme le relativisme culturel.
Principes du relativisme culturel
Le relativisme culturel est une thèse qui soutient que les croyances et les activités mentales d'un individu dépendent de la culture à laquelle il appartient. Il repose sur plusieurs principes clés :
- La reconnaissance de la diversité des cultures et de leur égale dignité.
- Une tolérance accrue à l'égard des autres cultures.
- L'impossibilité de juger moralement les actes d'un individu d'un point de vue extérieur. Par exemple, la pratique de la polygamie n'est pas une marque de sauvagerie, mais fait partie intégrante du mode de fonctionnement d'une société donnée.
- L'affirmation que les normes et les règles morales changent d'une culture à l'autre. Il n'existe donc pas de modèle culturel universel : les normes ne sont pas absolues, elles sont le résultat de coutumes et de pratiques sociales.
- Ces règles ne peuvent être comprises qu'à l'intérieur de l'aire culturelle où elles ont émergé.
Les défis pour l'ethnologue
Néanmoins, le relativisme culturel met l'ethnologue dans une position difficile. En tant que scientifique, le regard qu'il porte sur les sociétés étudiées doit être objectif. Mais en même temps, cette attitude risque de l'amener à accepter des comportements qu'il condamnerait par ailleurs, comme la cruauté.
La solution pourrait consister à suspendre tout jugement moral dans le cadre de l'étude des populations, et à refuser de penser les cultures sur le mode du progrès ou de l'évolution, tout en maintenant l'exigence du respect de la dignité de l'être humain comme idéal.