Les Fondements du Contrat Social : Concepts Clés de Rousseau
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Le Contrat Social
« Trouver une forme d'association qui défende et protège de toute la force commune la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun, s'unissant à tous, n'obéisse pourtant qu'à lui-même, et reste aussi libre qu'auparavant. » Tel est le problème fondamental dont la solution est donnée par le Contrat social.
Les termes de ce contrat sont si bien déterminés par la nature de l'acte que la moindre modification les rendrait nuls et non avenus. De sorte que, même s'ils n'ont jamais été formellement énoncés, ils sont partout les mêmes et ont été partout tacitement reconnus et acceptés. Si le pacte social est violé, chacun reprend ses droits originels.
Le Souverain
Il découle de cette formule qu'un acte d'association implique un engagement mutuel, à la fois public et privé. L'individu, en s'engageant pour ainsi dire avec lui-même, se trouve obligé en vertu d'une double relation : en tant que membre du souverain envers les particuliers, et en tant que membre de l'État envers le souverain.
L'État Civil
L'homme perd sa liberté naturelle et le droit illimité à tout ce qu'il désire et peut atteindre, mais gagne en retour la liberté civile et la propriété de ce qu'il possède. Pour éviter toute erreur sur cette compensation, il est nécessaire de distinguer la liberté naturelle, dont les limites sont les forces de l'individu, de la liberté civile, limitée par la volonté générale, et la possession, qui n'est pas le simple effet de la force ou le droit du premier occupant, mais qui ne peut être fondée que sur un titre positif.
Le Domaine Réel
Le droit du premier occupant, quoique plus réel que celui de la force, ne devient un vrai droit qu'après l'établissement de la propriété. L'homme a naturellement droit à tout ce dont il a besoin ; mais l'acte positif qui le rend propriétaire d'un bien l'exclut de tout autre. Une fois sa part acquise, il doit s'y limiter et n'a plus de droit sur le reste de la communauté. D'où la raison pour laquelle le droit du premier occupant, si faible à l'état de nature, est respectable dans l'état civil. Ce droit, moins respecté que celui qui appartient à autrui, n'est pas un droit absolu.
La Souveraineté est Inaliénable
J'affirme donc que l'exercice de la souveraineté, n'étant que la volonté générale, ne peut jamais être aliéné, et que le souverain, n'étant qu'un être collectif, ne peut être représenté que par lui-même : la puissance peut être transmise, mais non la volonté.
La Souveraineté est Indivisible
La souveraineté est indivisible pour la même raison qu'elle est inaliénable ; parce que la volonté est générale ou ne l'est pas. La déclaration de cette volonté constitue un acte de souveraineté et fait loi ; la seconde n'est qu'une volonté particulière ou un acte de magistrature, tout au plus un décret.
La Volonté Générale Peut-elle Errer ?
Il s'ensuit de ce qui précède que la volonté générale est toujours droite et tend toujours à l'utilité publique, mais il ne s'ensuit pas que les délibérations du peuple aient toujours la même rectitude.
Le peuple veut inévitablement son bien, mais ne le comprend pas toujours. On ne corrompt jamais le peuple, mais on le trompe souvent, et c'est alors seulement qu'il semble vouloir le mal.
Les Limites du Pouvoir Souverain
Si l'État ou la Cité n'est qu'une personne morale dont la vie consiste dans l'union de ses membres, et si le plus important de ses soins est celui de sa conservation, il lui faut une force universelle et compulsive pour mouvoir et disposer chaque partie de la manière la plus convenable au tout. De même que la nature donne à chaque homme un pouvoir absolu sur tous ses membres, le pacte social donne au corps politique un pouvoir absolu sur tous les siens. C'est ce même pouvoir qui, dirigé par la volonté générale, porte, comme je l'ai dit, le nom de souveraineté.
La Loi
Par l'acte de constitution, on a donné l'existence et la vie au corps politique ; il s'agit maintenant de lui donner le mouvement et la volonté par la législation. Car l'acte primitif par lequel ce corps se forme et s'unit ne détermine rien de ce qu'il doit faire pour se conserver.
Qu'est-ce que le Gouvernement ?
Un corps intermédiaire établi entre les sujets et le souverain pour leur mutuelle correspondance, chargé de l'exécution des lois et du maintien de la liberté, tant civile que politique.
Les membres de ce corps s'appellent magistrats ou rois, c'est-à-dire des gouverneurs, et le corps entier s'appelle le prince. Ainsi, ceux qui prétendent que l'acte par lequel un peuple se soumet à des chefs n'est point un contrat ont parfaitement raison. En effet, ce n'est qu'une commission, un emploi, dans lequel, simples officiers du souverain, ils exercent en son nom le pouvoir dont il les a faits dépositaires.
De l'Aristocratie
Cette forme de gouvernement a deux personnes morales très distinctes : le gouvernement et le souverain, et par conséquent deux volontés générales, l'une par rapport à tous les citoyens, l'autre par rapport aux membres de l'administration seulement.
De la Monarchie
Jusqu'ici nous avons considéré le prince comme une personne morale et collective, unie par la force des lois, et dépositaire dans l'État de la puissance exécutive. Nous avons maintenant à considérer cette puissance réunie entre les mains d'une personne naturelle, d'un homme réel, qui seul ait le droit d'en disposer selon les lois. Cette personne est appelée monarque ou roi.
De la Dictature
Si le mal est tel qu'il faille y remédier en concentrant l'activité de l'administration sur un ou deux membres, ce n'est pas l'autorité de la loi qui est modifiée, mais seulement la forme de l'administration.
Mais si le danger est tel que l'appareil des lois est un obstacle à leur conservation, alors on nomme un chef suprême qui fasse taire toutes les lois et suspende un moment l'autorité souveraine.
De la Censure
De même que la déclaration de la volonté générale se fait par la loi, la manifestation de l'opinion publique se fait par la censure. L'opinion publique est la sorte de loi dont le censeur est le ministre, et qu'il ne fait qu'appliquer aux cas particuliers. Le tribunal censorial n'est point l'arbitre de l'opinion du peuple, mais seulement son organe. Dès qu'il s'en écarte, ses décisions sont vaines et sans effet.
De la Religion Civile
En plaçant Dieu à la tête de chaque société politique, il s'ensuivit qu'il y eut autant de dieux que de nations, car il n'était pas possible que deux peuples étrangers, et presque toujours ennemis, pussent longtemps reconnaître un même maître, non plus que deux armées qui obéissent au même général. Ainsi naquirent des divisions nationales le polythéisme et l'intolérance théologique et civile.