Histoire des prêts maritimes et de l'affrètement

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Section 1 : Les prêts maritimes primitifs

Les premières traces de prêts maritimes remontent aux lois de Manou en Inde, dix siècles avant J.-C. Ces textes évoquent le prêt d'argent destiné à financer des activités maritimes.

Dans la Grèce antique, deux modes de prêts maritimes existaient :

  • Un prêt pour une expédition en mer ou le retour d'un voyage unique.
  • Un prêt pour un voyage aller-retour, appelé Anfoteroploun. L'Eteroploun, quant à lui, concernait un prêt pour un seul voyage.

Dans ces contrats, le prêteur pouvait soit confier son argent à une personne de confiance, soit embarquer lui-même sur le navire pour surveiller l'emprunteur. Le prêteur, souvent un commerçant, gérait le navire et la vente des marchandises à destination. Ces prêts favorisaient la circulation monétaire et facilitaient l'échange de devises et de produits.

Ces contrats étaient souvent formalisés par un document appelé Syngrapha. La Syngrapha nautique était un écrit consignant un emprunt maritime, détaillant les dispositions contractuelles pour sécuriser l'entreprise et les obligations de l'emprunteur. En cas de destruction de ce document, le prêteur ne pouvait plus faire valoir ses droits en justice.

À Rome, les activités maritimes utilisaient fréquemment la confiance (fiducia), un contrat basé sur la transmission de propriété avec accord de restitution. Bien que ces deux formes puissent être utilisées dans le droit maritime, le foenus nauticum était le plus répandu. Il s'agissait d'un prêt où l'argent était versé au propriétaire d'un navire pour être utilisé en mer, que ce soit pour des réparations ou l'achat de marchandises. Le remboursement n'était dû qu'en cas d'arrivée à bon port, les risques de la navigation incombant au prêteur. Ce contrat générait un intérêt légal, et le montant emprunté était appelé Pecunia Traiectitia.

La nature juridique du foenus nauticum fait débat, mais la majorité des auteurs le considèrent comme un contrat spécial, calqué sur le modèle grec. Son remboursement étant subordonné à l'arrivée du navire, il présentait des particularités.

Le droit romain a vu trois phases dans l'évolution de ce contrat :

  1. Le transport du capital.
  2. L'emprunt pouvait porter sur les produits du capital.
  3. Le capital était utilisé non seulement pour acheter des biens, mais aussi pour réparer le navire ou payer les salaires.

Article 2 : L'affrètement dans la Méditerranée médiévale et moderne

Le droit romain distinguait deux concepts : locatio navis et locatio rerum vehendarum.

  • La locatio navis consistait à louer un navire entier pour une traversée maritime moyennant un prix convenu.
  • La locatio rerum vehendarum concernait la location d'un espace sur un navire pour transporter des marchandises sur une route maritime donnée, moyennant un fret.

Ces institutions ont donné naissance à l'affrètement (Noliejament / a Scarum / ad / a Scarso), qui impliquait la location d'un navire entier pour un prix fixe.

L'affrètement pouvait prendre deux formes :

  • La charte pour un voyage spécifique, un aller-retour, ou pour une durée déterminée (semaines ou mois). Le fret était un montant fixe.
  • L'affrètement Quintarades / a Chait / a Quintaci, apparu au XIIe siècle, consistait en la location d'espace à l'intérieur du navire. Il correspondait à une époque où les marchandises échangées étaient coûteuses, de faible volume et de grande valeur.

Les douanes de Tortose, l'Agence des douanes de la mer et le Consulat de la mer ont documenté ce contrat. L'affrètement pouvait être conclu par écrit (acte public devant notaire ou acte sous seing privé par un intermédiaire) ou oralement, parfois devant témoins.

La charge des marchandises incombait aux affréteurs, ainsi que les frais de chargement. La réception des marchandises se faisait à la porte du navire et était consignée dans un registre par le greffier. Les marchandises étaient chargées en cale, et le Livre des prohibitions du Consulat de la mer mentionne des frais d'entrée pour les marchandises susceptibles d'être endommagées par les vagues. Cependant, le paiement de ces frais ne concernait que les marchandises de moindre valeur.

Séjour et surestaries

Les séjours correspondent aux jours alloués au chargement du navire, selon les indications du capitaine. Les surestaries représentent le temps supplémentaire utilisé pour charger le bateau, entraînant un délai dont le paiement incombait aux affréteurs.

Depuis la seconde moitié du XIVe siècle, une nouvelle forme d'affrètement est apparue : la charte de l'Baix d'alt e longues Travers. Elle répondait à un changement dans le commerce, avec l'essor des produits bon marché échangés en grandes quantités (bois, blé, riz, vin, bétail). Cela nécessitait de grands espaces à bord pour charger des marchandises homogènes. Ce mode d'affrètement impliquait la location du navire entier pour transporter un type de marchandise, avec un prix forfaitaire par unité ou par partie du navire, variant selon le type de biens, les routes maritimes ou la saison.

Section 5 : L'affrètement dans le droit codifié

Le Code de commerce français de 1807 a repris trois termes : Affrètement, Nolissement, Charte-partie, reflétant les traditions méditerranéenne et atlantique. Ce code a été modifié en 2000.

Le code français stipulait que le contrat d'affrètement devait être établi par écrit et mentionner : le nom du navire, sa capacité, le nom du capitaine, de l'affréteur et de l'armateur, les lieux de chargement et de déchargement, le prix et le mode de transport.

Le Code de 1829 précisait les modalités de chargement et de déchargement, ainsi que le paiement du fret, qui pouvait s'effectuer avant le départ, pendant le voyage, ou à l'arrivée. Le capitaine bénéficiait d'un privilège sur les marchandises en cas de non-paiement.

Le Code de commerce espagnol de 1885 ne reconnaissait que la charte-partie pour l'utilisation du navire.

Le Code de commerce italien de 1882, inspiré du code de la marine marchande vénitienne de 1786, mettait l'accent sur la location du navire et les contrats d'expédition, y compris pour les voies navigables intérieures.

Une réforme conceptuelle majeure a eu lieu avec le Code italien de la navigation de 1942, sous l'impulsion d'Antonio Sialoza. Ce code distinguait :

  • Le contrat d'utilisation du navire.
  • Le contrat de navigation maritime.
  • Les contrats intermédiaires entre l'utilisation du navire pour la navigation internationale et les contrats d'utilisation d'avions pour la navigation aérienne.

Il parlait de :

  • Location
  • Charte
  • Transports (divisés en transport de personnes, passage de navire, fret total, fret partiel)

Le remorquage était également mentionné.

La différence principale résidait dans l'usage : la location impliquait la jouissance du bien, la charte était nécessaire pour la navigation et la conformité du voyage, et le transport concernait le déplacement des marchandises avec les risques associés.

Le prêt du navire ou de l'aéronef consistait en la livraison d'un navire ou d'un avion sans charge, pour une utilisation temporaire et spécifique, avec obligation de restitution. Ce contrat présentait plusieurs aspects juridiques : il était gratuit, réel (se perfectionnait par la livraison), devait être restitué dans son intégralité et dans les délais, et engageait la responsabilité des dommages causés lors de l'utilisation.

Le bail était un contrat par lequel les parties s'engageaient à jouir d'un navire ou d'un avion en contrepartie d'une redevance. Il existait deux variétés : la location de la coque du navire ou de l'avion, et la location du navire ou de l'avion équipé des instruments de navigation et de l'équipage.

La charte-partie, dans le droit italien, suivait le modèle classique. Il s'agissait d'un contrat par lequel un armateur, moyennant paiement, s'engageait à réaliser un métier particulier, plusieurs voyages, ou à développer son activité pendant une période donnée. Ce contrat comprenait la charte à temps et l'affrètement au voyage. C'était un contrat consensuel, parfait dès la rencontre des volontés.

Les obligations de l'armateur étaient :

  1. Mettre à disposition de l'affréteur le navire et l'espace convenu.
  2. Assurer la navigabilité du navire et son armement avec l'équipage nécessaire.
  3. Fournir l'activité de l'équipage.

Les obligations de l'affréteur étaient :

  1. Utiliser le navire conformément aux dispositions légales.
  2. Payer le fret dans les délais impartis.
  3. Restituer le navire à l'armateur à la fin du contrat.

Il existait également le subaffrètement (l'affréteur sous-louant le navire à un tiers) et le transfert du contrat d'affrètement (l'affréteur cédant son contrat à une autre personne).

La résiliation du contrat pouvait intervenir :

  • Conformément à l'accord sur le voyage.
  • Pour cause de résolution appropriée du contrat de transport.
  • À la fin de la durée du contrat, s'il était à durée déterminée.

Le transport se divisait en :

  • Transport par eau de personnes ou de choses (actifs spécifiques, charge totale ou partielle).
  • Transport aérien de personnes, bagages ou marchandises.

Le contrat de transport de marchandises était consensuel, parfait par l'accord des volontés, devait être établi par écrit, et pouvait concerner des choses singulières, une charge partielle ou une charge complète.

Il existait une période de séjour et des surestaries pour le chargement du navire.

L'avion utilisait rarement la charte de navigation, privilégiant la location ou le transport. Le transport était le déplacement de biens d'un lieu à un autre, avec les risques et l'obligation de transport correspondants.

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