La philosophie politique de Kant : républicanisme et paix
Classé dans Sciences humaines et sociales
Écrit le en
français avec une taille de 6,27 KB
La constitution républicaine et la paix perpétuelle
Kant se demande si la constitution républicaine est la seule qui puisse atteindre la paix perpétuelle entre les États. Tout d'abord, la constitution républicaine de Kant a des caractéristiques semblables à celles de son éthique formelle :
- La liberté
- L'universalité
- L'autonomie
Kant affirme que la constitution républicaine est une forme de gouvernement représentant la volonté des citoyens. Sur cette base, il explique pourquoi il estime que la paix perpétuelle est possible grâce à elle : dans une constitution républicaine, le consentement des citoyens est exigé pour décider de faire la guerre. Il croit que les gens réfléchiront mûrement avant de déclarer la guerre à un autre État, en raison des conséquences négatives qu'elle entraîne. En revanche, dans un régime non représentatif, le souverain est celui qui décide de la guerre pour son plaisir ou son profit personnel, sans se soucier des conséquences pour ses citoyens. Pour défendre la paix entre les peuples, Kant n'utilise pas des arguments altruistes (la guerre est mauvaise pour les autres) ou éthiques (contraire à la dignité), mais des arguments égoïstes : le rejet de la guerre parce qu'elle coûte de l'argent et nous nuit. Autrement dit, des arguments égoïstes sont utilisés pour produire un résultat non égoïste et éthiquement correct : la paix perpétuelle.
Républicanisme contre despotisme
Kant distingue deux modes d'État selon leur constitution ou leur gouvernance. Cette classification oppose le républicanisme au despotisme. Kant explore les fondements de la politique, à la recherche d'un principe de souveraineté humain, qu'il trouve dans la constitution républicaine.
Le républicanisme selon Kant
Pour Kant, le républicanisme est à la fois souhaitable, indispensable et réalisable.
- La république est souhaitable, car elle favorise la paix perpétuelle. En effet, si ce sont les citoyens qui décident de la guerre, il est probable qu'ils y réfléchiront mûrement avant d'engager un conflit.
- La république est indispensable, car elle concilie deux absolus contradictoires dans la vie des citoyens : l'ordre et la liberté. Ainsi, la citoyenneté républicaine se définit comme l'autonomie, c'est-à-dire l'obéissance à la loi que l'on s'est donnée à soi-même.
- Enfin, la république est réalisable, même, dans une perspective historique, pour un « peuple de démons ». Les institutions doivent viser à concilier les intérêts individuels au profit de tous.
Kant dit que le citoyen doit agir en tant que co-législateur dans la société à laquelle il appartient. La constitution républicaine de Kant correspond à ce que nous appelons aujourd'hui une démocratie parlementaire, une république ou une monarchie constitutionnelle.
Le despotisme
À l'opposé du républicanisme se trouve le despotisme, ou l'absolutisme. Un gouvernement despotique est un gouvernement sans limites. Son principe est celui d'un État qui exécute arbitrairement les lois qu'il a lui-même édictées. Kant compare le despotisme et le républicanisme en se basant sur l'exercice du pouvoir. D'une part, le despotisme est fondé sur un pouvoir absolu, sans séparation des pouvoirs législatif et exécutif. D'autre part, le républicanisme est basé sur les principes de liberté et d'égalité des citoyens, ce qui implique une séparation des pouvoirs.
La critique kantienne de la démocratie
Pour Kant, la démocratie (au sens de démocratie directe) est une forme de despotisme. Elle établit un pouvoir exécutif où tous décident de tout, y compris contre un seul, ce qui peut être contraire à la volonté générale. L'opinion d'un individu peut être invalidée par la masse ; la volonté de tous n'est donc pas la volonté pour tous, ce qui s'oppose à la liberté. En d'autres termes, la démocratie selon Kant est une tyrannie car, en l'absence de gouvernement représentatif, la séparation des pouvoirs législatif et exécutif devient impossible.
Le rôle central de la représentation
Chez Kant, la souveraineté du peuple s'exerce par la représentation. Cela ne signifie pas que le peuple édicte lui-même les lois qui s'appliquent à lui. Kant pense que la souveraineté populaire nécessite d'être incarnée par un monarque ou une assemblée de députés pour lui donner réalité et efficacité. Le peuple délègue au monarque ou aux députés le pouvoir de légiférer. En conséquence, les citoyens sont soumis à des lois qu'ils se sont données par l'intermédiaire de leurs représentants. Grâce à la représentation, les lois expriment la volonté de tous, même de ceux qui ne peuvent pas voter, de sorte que ces lois acquièrent une valeur universelle, que tous les citoyens aient participé au vote ou non. L'État républicain n'exige pas le consentement unanime ou majoritaire pour chaque loi, ce qui le différencie de la démocratie directe. Cette dernière s'oppose à ce principe, car si chacun veut être souverain, la représentation devient impossible. En revanche, l'aristocratie et l'autocratie (monarchie) peuvent adopter ce mode de gouvernement représentatif. Si le consentement de chaque citoyen était décisif, aucun accord ne serait possible, et la loi ne serait que l'expression de la volonté de la majorité imposée à la minorité. Le gouvernement doit être représentatif pour incarner la volonté générale. Un gouvernement non représentatif est nécessairement despotique, car celui qui exécute la loi est aussi celui qui la crée, ce qui est la définition de l'arbitraire. Kant estime que l'autocratie (le gouvernement d'un seul) et l'aristocratie (le gouvernement de plusieurs) peuvent être non représentatives, et donc défectueuses, mais qu'elles peuvent évoluer vers la représentation. Cependant, cette évolution est impossible pour le gouvernement de tous, c'est-à-dire la démocratie. Moins il y a de gouvernants, plus il est facile pour le gouvernement de devenir représentatif. Ainsi, le passage au républicanisme est plus aisé dans une monarchie que dans une aristocratie, et quasiment impossible dans une démocratie.