Le Réalisme et le Naturalisme dans la Littérature Espagnole du XIXe Siècle

Littérature au XIXe Siècle : Réalisme et Naturalisme

Le réalisme est arrivé tardivement en Espagne, mais la production littéraire réaliste a atteint un développement considérable. Plusieurs facteurs ont contribué à l'introduction du réalisme : le succès des articles de mœurs publiés dans la presse, des brochures traitant de questions sociales, et les romans-feuilletons d'auteurs étrangers, qui ont atteint un large public, comme les œuvres de Balzac.

Le genre narratif domine, comme dans d'autres pays, éclipsant l'opéra et le théâtre, malgré le succès que rencontraient les poètes et dramaturges de l'époque.

La Poésie

Le représentant le plus important du réalisme en poésie est Ramón de Campoamor, qui se caractérise par son antiromantisme.

Le Théâtre

Des auteurs comme Adelardo López de Ayala et Manuel Tamayo y Baus cultivent la haute comédie, genre caractéristique du réalisme, qui offre une réflexion critique de la société contemporaine. Mais le dramaturge le plus acclamé de l'époque est José Echegaray, lauréat du prix Nobel, qui exploite une formule proche du drame néoromantique. À la fin du siècle, Galdós a contribué au renouveau du théâtre en adaptant certaines de ses œuvres, mais il n'a obtenu le succès qu'avec Electra, une œuvre qui dénonce le fanatisme religieux.

La Prose

Les romanciers de la génération de 1868 ont expérimenté de nouvelles formes de récit pour remplacer les anciens modèles. Les romans de mœurs ouvrent la voie au réalisme et aux influences étrangères. Mais le triomphe final de la narration réaliste se produit avec la publication de La Fontana de Oro de Galdós. Les caractéristiques de la fiction réaliste sont les suivantes :

• L'observation de la réalité : l'auteur reflète dans ses œuvres la réalité qui l'entoure.
• La description est un outil fondamental pour les réalistes.
• Le narrateur n'est pas présent dans l'histoire, ce qui se traduit par un plus grand sens de l'objectivité.
• La langue est simple, sans fioritures excessives et adaptée à chaque personnage.

Le naturalisme a été accompagné de controverses. Emilia Pardo Bazán, dans son essai La Cuestión Palpitante, a rejeté le déterminisme matérialiste de Zola. Valera, Clarín et Galdós ont également participé à la controverse. Dans le récit espagnol, il est difficile de distinguer entre réalisme et naturalisme, ce dernier n'ayant influencé que des auteurs comme Galdós, Clarín et Pardo Bazán.

Les Auteurs du Roman Réaliste

Juan Valera

En littérature, il défendait l'art pour l'art, affirmant que l'art avait pour but d'améliorer la vie à travers la beauté. Il a écrit des articles, des contes, et, dans sa maturité, des romans. Ses œuvres ont une prose élégante, car il évite la laideur et les discours moralisateurs. C'est un auteur réaliste particulier, car il met l'accent sur la psychologie des personnages et l'analyse de leurs sentiments. Parmi ses œuvres, on peut citer El Comendador Mendoza, Doña Luz, Juanita la Larga. Son œuvre la plus importante est Pepita Jiménez, l'histoire d'un séminariste qui abandonne sa vocation pour Pepita, une jeune veuve.

Emilia Pardo Bazán

Elle a ravivé le débat sur le naturalisme dans La Cuestión Palpitante. Elle a écrit d'excellents contes et des romans réalistes et naturalistes. Los Pazos de Ulloa et La Madre Naturaleza décrivent le déclin de l'aristocratie terrienne, au milieu de descriptions de personnages et d'évocations du paysage galicien.

Benito Pérez Galdós

Il représente le sommet du réalisme en Espagne. C'est l'un des auteurs les plus prolifiques de son temps.

Les Episodios Nacionales sont composés de 46 romans regroupés en 5 séries de 10 volumes chacune (la dernière n'en compte que 6). Ils retracent les conflits qui ont marqué l'histoire de l'Espagne (de Trafalgar en 1805 à la Restauration en 1875). Avec eux, Galdós dépasse le roman historique romantique en racontant des événements d'un passé récent qui aident à comprendre l'Espagne de l'époque. Il entremêle des questions historiques et des fictions romanesques, des aspects spirituels et moraux, sans renoncer à une description détaillée de la réalité, comme dans Misericordia et Nazarín.

Romans de la Première Époque

Parallèlement à la première série des Episodios Nacionales, se distinguent des romans à thèse comme Doña Perfecta, Gloria et La Familia de León Roch, dans lesquels il critique l'intolérance et le fanatisme. D'autres romans de cette période sont La Fontana de Oro et Marianela.

Romans Espagnols Contemporains

Il s'agit de 24 romans qui décrivent la société contemporaine. Cette série commence avec La Desheredada, El Prohibido, Fortunata y Jacinta. D'autres romans de cette période sont El Amigo Manso, La de Bringas, Miau et Torquemada en la Hoguera. Galdós écrit des romans qui révèlent son intérêt pour les questions spirituelles et morales, comme Nazarín et Misericordia.

Le Sens de l'Œuvre de Galdós

Son intérêt réside dans sa volonté de dépeindre le paysage de la société espagnole contemporaine. Il offre une description détaillée de la société madrilène et une vision globale de l'histoire contemporaine de l'Espagne, des deux côtés, progressiste et traditionaliste, à la recherche de la tolérance et de l'harmonie entre les deux.

Leopoldo Alas, Clarín

C'était un homme épris de liberté et d'idées républicaines, très critique envers le catholicisme traditionnel et sensible à l'injustice sociale.

Œuvre Critique

C'était un porte-parole craint et respecté, qui a écrit sur de nombreux sujets. En tant que critique littéraire, il a révélé sa lucidité pour juger les nouveaux livres. Il a été un grand défenseur de Galdós et a accepté le naturalisme avec réserves.

Œuvre Narrative

Il a été un grand auteur de contes et de nouvelles, parmi lesquels figurent certains des meilleurs qui ont été écrits au XIXe siècle : ¡Adiós, Cordera!, Berta et Doña Berta. Il n'a écrit que deux romans : Su Único Hijo et La Regenta. Ce dernier raconte l'histoire d'Ana Ozores, la Regenta, mariée à Don Víctor, un homme plus âgé qu'elle et régent de l'Audiencia. L'insatisfaction émotionnelle et physique d'Ana la rapproche de son confesseur, Fermín, qui tombe amoureux d'elle, et d'Álvaro, un séducteur expérimenté à qui Ana se livre. Tout finit par être découvert.

Dans La Regenta, on peut souligner les aspects suivants :

• La psychologie des personnages, en particulier les portraits d'Ana et de Fermín. Les autres personnages, outre les principaux, sont magistralement décrits.
• La description de la ville de Vetusta (Oviedo), qui représente la société de l'Espagne de la Restauration. Clarín dépeint, d'un point de vue critique et ironique, la corruption d'une ville de province hypocrite qui détermine le comportement des personnages et influence le protagoniste.
• Une structure parfaite : le roman est divisé en deux parties. La première (chapitres 1 à 15) se déroule en trois jours et présente, à un rythme très lent, l'environnement et la psychologie des personnages. La seconde (chapitres 16 à 30) se déroule en trois ans et développe le conflit à un rythme rapide.
• Des techniques narratives innovantes : narrateur omniscient, monologue intérieur.