Le roman picaresque et autres genres narratifs de la Renaissance

Classé dans Langue et de philologie

Écrit le en français avec une taille de 7,18 KB

Le roman picaresque

Les œuvres principales du sous-genre picaresque sont : Lazarillo de Tormes (anonyme), Guzman d'Alfarache (Mateo Alemán) et La vie du Buscón (Francisco de Quevedo). Tous ces romans sont définis par les caractéristiques suivantes :

  • Ils relatent les mésaventures d'un personnage de faible statut social, le voyou, qui vit au service de plusieurs maîtres.
  • L'histoire est présentée comme une autobiographie fictive et rétrospective du protagoniste. Le lecteur est témoin du développement psychologique du voyou, qui perd progressivement son innocence.
  • Le narrateur écrit à propos de son passé lorsqu'il est un adulte. Au cours de sa vie, il alterne chance et malheur, toujours encouragé par le désir d'ascension sociale. Chacun des chapitres présente habituellement les aventures du voyou avec un maître différent.
  • L'intrigue est conçue de manière à ce que les divers événements et épisodes soient soumis à un projet final : expliquer le déshonneur que vit le personnage à la fin de l'histoire.
  • Les œuvres picaresques sont réalistes et offrent un portrait social large et varié.

Lazarillo de Tormes

Lazarillo de Tormes est le premier des romans picaresques et a donné naissance au sous-genre. L'auteur est anonyme. Plusieurs interprétations ont été proposées pour expliquer cet anonymat :

  • En raison de la charge critique du roman, il a été attribué à un écrivain d'idéologie érasmienne ou à un juif converti.
  • Il a également été question d'un prêtre, qui aurait tu son identité car l'œuvre est clairement anticléricale.
  • La nature autobiographique du roman encourage l'anonymat. Lazarillo est l'histoire d'un voyou racontée par lui-même, et les événements décrits ne correspondent pas à un auteur instruit. Cela donne de la crédibilité au livre, car personne ne voudrait paraître un auteur cultivé racontant l'histoire d'un personnage peu exemplaire.

Structure et argument

Le Lazarillo est conçu comme une lettre adressée à un inconnu. Lazare y justifie son mode de vie déshonorant. L'œuvre se compose d'un prologue et de sept traités, chacun se concentrant sur un maître et retraçant la vie du protagoniste de sa naissance jusqu'au récit. Chaque chapitre narre l'adversité, l'intimidation et la tromperie dont il souffre, et comment il évolue progressivement, perdant son innocence initiale. Son parcours éducatif est inversé, le menant à la honte : à la fin de l'œuvre, il est prédicateur et consent cyniquement à l'adultère de sa femme en échange de sa survie. Les trois premiers traités sont les plus développés ; les autres chapitres sont plus schématiques.

Thèmes et intention

Les thèmes principaux du livre sont :

  • L'honneur : Dès le prologue, il est clair que c'est le motif central de l'œuvre. À l'époque, l'honneur dépend de l'opinion des autres. Lazare, de basse extraction, ne peut y aspirer. L'œuvre critique la structure sociale.
  • La critique du clergé et de la noblesse : Cinq des neuf maîtres de Lazare appartiennent au monde ecclésiastique et aucun d'eux n'a un comportement exemplaire.
  • La faim et le manque de nourriture sont des motifs récurrents.

Les enseignements de ses maîtres n'empêchent pas sa déchéance sociale.

Style

Le livre est une autobiographie épistolaire. L'humour est au service du récit. Contrairement au style artificiel de son époque, Lazarillo est célèbre pour sa langue naturelle et sa simplicité.

Importance

Lazarillo inaugure le roman moderne :

  1. Son personnage principal est d'origine modeste et anti-héroïque.
  2. L'accent est mis sur le développement psychologique du protagoniste.
  3. Son style est réaliste : il relate des événements contemporains, se déroule dans un lieu connu, avec des personnages crédibles qui utilisent un langage approprié à leur rang social.

Autres genres narratifs de la Renaissance

Le roman idéaliste

Le récit idéaliste présente un monde idéalisé, peuplé de personnages fantastiques et des intrigues invraisemblables.

1. Le roman de chevalerie

Ce genre est originaire de l'époque médiévale et a connu un grand développement au XVIe siècle grâce à l'imprimerie. On distingue notamment :

  • Tirant le Blanc de Joanot Martorell (1511), écrit en catalan et traduit en castillan. Cervantes le considérait comme le meilleur livre du monde.
  • Amadis de Gaule de Garci Rodríguez de Montalvo (1508). Il se caractérise par des éléments fantastiques et l'enseignement des vertus chevaleresques : honneur, courage, fidélité, religiosité.

2. Le roman pastoral

D'origine italienne (L'Arcadia de Sannazaro, 1504), ce genre met en scène des bergers idéalisés dans un cadre idyllique. Il comprend des fragments de vers lyriques. En Espagne, on peut citer La Diana de Jorge de Montemayor (1559), La Diana enamorada de Gaspar Gil Polo (1564), La Galatée de Cervantes (1585) et L'Arcadia de Lope de Vega (1598).

3. Le roman byzantin

Ces histoires d'amour, de voyages et d'aventures mettent en scène un couple d'amoureux séparés par le malheur, vivant des aventures étranges et compliquées qui se terminent par des retrouvailles heureuses. L'histoire des amours de Théagène et Chariclée d'Héliodore (traduit par Alonso Núñez de Reinoso) est le premier roman de ce genre en espagnol. On peut également citer Les travaux de Persilès et Sigismonde de Cervantes (1617).

4. Le roman mauresque

Issu des ballades frontalières du XVe siècle, ce genre narre des histoires d'amour entre musulmans et chrétiens, souvent idéalisées. L'histoire du bel Abencerraje et de la belle Jarifa (auteur inconnu) est un exemple de roman sentimental mauresque. On trouve également l'histoire d'Ozmín et Daraja dans Guzman d'Alfarache de Mateo Alemán.

Cervantès

Contemporain de Shakespeare, Cervantès a exploré tous les genres littéraires : le roman pastoral (La Galatée), le théâtre (La Numancia, Le traité d'Alger), les nouvelles (Nouvelles exemplaires), le roman byzantin (Les travaux de Persilès et Sigismonde) et bien sûr le roman avec Don Quichotte de la Manche.

Les Nouvelles exemplaires

Publiées en 1613, ces douze nouvelles se concentrent sur un ou plusieurs personnages et visent à éduquer les lecteurs. L'amour est le thème central, abordé sous différents angles :

  1. L'amour comme point de départ d'une relation digne (La Gitanilla, L'amant libéral, L'anglaise espagnole)
  2. L'amour soumis à la nécessité du mariage (Les deux demoiselles, La Señora Cornelia)
  3. L'amour et le mariage relégués au second plan (Rinconete et Cortadillo, Le licencié Vidriera, etc.)

Entrées associées :