Le Second Empire (1852-1870) : De l'Autoritarisme à la Chute
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Introduction au Second Empire (1852-1870)
Le Second Empire est la période, en France, pendant laquelle Napoléon III régna en tant qu'empereur, c'est-à-dire de 1852 à 1870, entre la Deuxième et la Troisième République.
À l'origine, le Second Empire est un régime politique dictatorial où la plus grande partie du pouvoir est entre les mains de Napoléon III. Il dispose notamment :
- Du pouvoir exécutif ;
- De la partie la plus importante du pouvoir législatif (le droit d'initiative des lois).
Les députés, bien qu'élus au suffrage universel, sont des "créatures" du régime et n'ont que peu de pouvoir. L'opinion est bâillonnée et la population surveillée. Les opposants politiques sont emprisonnés, déportés ou en exil.
L'évolution vers l'Empire libéral (après 1860)
Cependant, à partir de 1860, Napoléon III est obligé d'accorder plus de liberté politique. En particulier, les députés obtiennent progressivement le droit de critiquer la politique gouvernementale. La presse obtient plus de liberté et l'opposition politique peut s'exprimer et envoyer des députés (royalistes ou républicains) au Corps législatif.
En 1870, Napoléon III renonce au pouvoir législatif au profit du Corps législatif où les opposants sont nombreux. En avril 1870, une majorité de Français approuve cette évolution. Mais le 19 juillet 1870, Napoléon III déclare la guerre à la Prusse, vite rejointe par les autres États allemands. Napoléon III est battu et fait prisonnier. Le 4 septembre 1870, la République est proclamée à Paris.
1. L’Empire autoritaire : la dictature de Napoléon III (1852-1860)
Après son coup d'État du 2 décembre 1851, Louis-Napoléon Bonaparte, président de la Première République, rédige une nouvelle constitution, copiée sur celle de l'an VIII imposée en 1799 par son oncle Napoléon Bonaparte. Il effectue ensuite de nombreux voyages officiels dans les départements afin de sonder les Français sur son projet de rétablissement de l'Empire.
Fin novembre 1852, par un vote plébiscitaire, 7,8 millions de Français acceptent le rétablissement de l'Empire, avec pour empereur Louis-Napoléon, qui prend le titre de Napoléon III. Il y a cependant 253 000 électeurs qui ont voté non et 2 millions d'abstentionnistes.
Les pouvoirs étendus du chef de l’État
Le chef de l'État détient la totalité du pouvoir exécutif. Il n'est responsable que devant le peuple, dont il demande le soutien à l'occasion du plébiscite. Ses prérogatives incluent :
- La nomination des ministres (qui ne sont responsables individuellement que devant lui) ;
- La nomination des préfets des départements, qui nomment ensuite les fonctionnaires ;
- La déclaration de guerre et la signature des traités de paix ou de commerce ;
- Le droit exclusif d'initiative des lois.
Les fonctionnaires et les députés doivent prêter serment de fidélité au chef de l'État.
Le pouvoir législatif limité et surveillé
Le pouvoir législatif est confié à deux assemblées :
Le Corps législatif
Composé d'environ 260 députés élus pour six ans au suffrage universel masculin. Le Corps législatif vote les textes de lois proposés par le gouvernement sans pouvoir les modifier. Les députés ne disposent pas du droit d'interpellation des ministres, ni du droit d'adresse pour répondre au discours du trône annuel. Les débats sont publics, mais le compte rendu est rédigé par le président de l'assemblée (nommé par le chef de l'État). La presse (seul moyen d'information à l'époque) ne peut publier que ce compte rendu officiel.
Le Sénat
Comprend 150 sénateurs, dont 80 sont nommés à vie par le chef de l'État. Le Sénat peut intervenir par sénatus-consultes pour régler ce qui n'a pas été prévu dans la Constitution. Il examine les lois votées avant leur promulgation. Si une loi se révélait contraire aux idées des dirigeants, le Sénat l'annulait. Les séances du Sénat ne sont pas publiques.
Le trucage des élections et le contrôle des opposants
Bien que les élections aient lieu au suffrage universel masculin, le régime met en place des mécanismes de contrôle :
- Les préfets découpent les territoires pour créer des circonscriptions électorales favorables aux candidats soutenus par le pouvoir.
- Les réunions électorales entre le candidat et les électeurs sont interdites.
- Seuls les candidats "officiels" ont droit aux affiches blanches (couleur des affiches officielles) et sont souvent les seuls à pouvoir imprimer leur bulletin de vote (un obstacle majeur pour les nombreux illettrés de l'époque).
- La garde des urnes électorales est confiée aux maires, nommés par les préfets.
Aux élections législatives de 1852, sur 261 députés, 253 étaient "gouvernementaux". Les députés opposants élus, refusant de prêter le serment de fidélité au chef de l'État, n'avaient pas le droit de siéger.
Un contexte socio-économique favorable au régime
Pendant longtemps, une grande partie de l'opinion publique est favorable à la dictature impériale. Ce soutien repose sur plusieurs piliers :
- Les conservateurs catholiques : Ils soutiennent le régime, notamment car l’Empereur protège l'indépendance du pape en Italie et favorise l'influence du clergé (application de la loi Falloux, implantation de congrégations religieuses dans l'enseignement).
- Les ouvriers : Malgré des conditions de travail difficiles, ils bénéficient du développement économique, des grands travaux urbains (Haussmann à Paris) et de l'essor des chemins de fer, ce qui assure du travail et réduit le chômage qui avait précédé 1848.
- Le patronat : Il est le grand bénéficiaire de l'essor économique et parvient jusqu'en 1860 à limiter la concurrence des produits anglais.
- Les ruraux et paysans : Le développement urbain favorise la consommation des produits agricoles. L'essor des chemins de fer permet le transport des produits sur tout le territoire et encourage la spécialisation régionale.
Le contrôle de l'information et de la population
La presse muselée : le décret de février 1852
Un décret de février 1852 permet de surveiller étroitement la presse. Les contraintes imposées aux journaux sont multiples :
- Obtention d'une autorisation préalable du gouvernement pour la création d'un journal.
- Dépôt d'un cautionnement, qui peut être perdu en cas de conflit avec l'administration.
- Acquittement d'un droit de timbre de 5 centimes par exemplaire, ce qui augmente le coût et réduit le nombre d'acheteurs.
- En cas de délits de presse, le journal est traduit devant le tribunal correctionnel (où siègent des juges dépendants du gouvernement), un système moins favorable que les cours d'assises avec jury populaire.
Diverses sanctions sont prévues pour limiter la liberté d'expression des rédacteurs. Le journal pouvait être averti par le ministère de l'Intérieur. Deux avertissements en deux ans entraînaient la suspension du journal pour deux mois. Un troisième avertissement provoquait la suppression définitive. De ce fait, la presse d'opposition, bâillonnée et étranglée financièrement, disparaît.
La surveillance de la population et de l'enseignement
Les 250 000 fonctionnaires, dont la nomination et la promotion dépendent du gouvernement, doivent surveiller la population et se faire les propagandistes des idées bonapartistes. Ces fonctionnaires sont eux-mêmes surveillés par les procureurs qui adressent des rapports au gouvernement.
Dans l'enseignement, le contrôle est strict :
- L'enseignement supérieur est épuré des éléments jugés républicains ou royalistes.
- L'enseignement de la philosophie et de l'histoire, matières jugées "dangereuses", est supprimé.
- La loi Falloux, qui place l'enseignement sous le contrôle de l'Église catholique, est appliquée sans défaillance.