La Seconde République Espagnole : Histoire et Réformes (1931-1933)
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La Proclamation de la Seconde République
La Deuxième République, marquée par une succession de changements, peut être divisée en trois étapes : le Biennat Réformateur (1931-1933), suivi du Biennat de centre-droit et de la période du Front Populaire (1933-1936). Nous allons ensuite développer la première étape. La période révolutionnaire des six années (1968-1974) a vu la première expérience démocratique avec la Constitution de 1869 et la proclamation de la Première République. Après le système de la Restauration (1874-1923), dans la nuit du 14 avril 1931, Niceto Alcalá Zamora proclama la Seconde République et appela le roi Alphonse XIII à quitter le pays. Cela s'explique par le fait que, lors des élections municipales du 12 avril, la coalition républicano-socialiste avait triomphé sur les royalistes dans les grandes villes. La monarchie était particulièrement affaiblie, n'obtenant le soutien que des zones rurales grâce au contrôle des caciques politiques. Ainsi, le Comité révolutionnaire, créé par le Pacte de San Sebastián, devint le Gouvernement provisoire de la République, dirigé par Alcalá Zamora et composé de tous les partis politiques qui le soutenaient. Il représentait généralement les classes moyennes professionnelles, la petite bourgeoisie et les dirigeants syndicaux aux idées socialistes. Avant la convocation des élections, un décret fut publié, modifiant la loi électorale de 1907 afin de mettre fin au système du caciquisme. La coalition des républicains et des socialistes remporta une écrasante majorité et, pour la première fois, trois femmes furent élues députées : les républicaines Clara Campoamor et Victoria Kent, ainsi que la socialiste Margarita Nelken. Ainsi fut adoptée la première constitution républicaine de l'histoire de l'Espagne : la Constitution de 1931.
La Constitution de 1931 et ses défis
La Constitution de 1931 définissait l'Espagne comme « une république démocratique de travailleurs de toutes sortes ». Elle contenait un énoncé général des droits et libertés : le droit de vote des femmes, le mariage civil, le divorce, et le droit à l'éducation primaire gratuite et obligatoire, alors que plus de 60 % de la population était analphabète. Elle reconnaissait également le droit à la propriété privée, bien que subordonné aux intérêts de l'économie nationale, ce qui permettait d'exproprier des terres en raison de leur utilité sociale. Une division claire des pouvoirs était établie : législatif (Congrès), exécutif (Chef de l'État) et judiciaire (juges et tribunaux). Le Parlement était monocaméral et le Président de la République était élu. Dans le domaine judiciaire, le Tribunal des Garanties Constitutionnelles fut créé. D'autre part, il est à noter qu'elle fut adoptée après d'âpres débats qui aggravèrent encore la division entre les partis. Les points les plus dommageables furent la ***question religieuse***, l'***organisation territoriale de l'État*** (en termes d'autonomie pour la Catalogne, le Pays Basque et la Galice), et le ***vote des femmes***. De cette façon, aucun consensus ne fut atteint entre la gauche et la droite, et la Constitution fut le résultat d'un accord entre l'aile gauche des républicains et les socialistes.
Contexte politique et défis économiques
En ce qui concerne l'action politique, le gouvernement dut faire face à certains des problèmes majeurs du pays, tels que les questions régionales, la réforme agraire, l'éducation, la réforme militaire et d'autres sujets sensibles de la politique publique (comme la création de la Garde d'Assaut). À tout cela s'ajoutaient une situation économique défavorable et une politique internationale tendue : le krach de 1929 avait particulièrement affecté le commerce extérieur, l'agriculture et les mines. Ainsi, l'économie espagnole subissait une involution, rendant difficile la mise en œuvre des réformes et intensifiant les conflits sociaux dans le cadre de la République.
Le Biennat Réformateur (1931-1933)
La construction d'un État laïc
Une fois la Constitution approuvée, le gouvernement fut formé avec Azaña comme président du Conseil (républicain-socialiste) et Alcalá Zamora comme Président de la République, inaugurant ainsi le Biennat Réformateur (1931-1933). La réforme la plus importante et la plus controversée fut la tentative de construire un État laïc. Cette laïcisation, qui accrut le nombre d'ennemis (notamment l'Église, les catholiques conservateurs et la droite), fut mise en œuvre par des lois et des articles constitutionnels entièrement anticléricaux : la séparation claire entre l'Église et l'État, la liberté de religion et la suppression du financement de l'État à l'Église. Plus tard, l'interdiction faite aux congrégations religieuses de pratiquer l'éducation, le commerce et l'industrie, la dissolution de la Compagnie de Jésus (dont les biens furent nationalisés), et la reconnaissance du mariage civil et du divorce, confirmèrent le caractère laïc de l'État.
La réforme des statuts d'autonomie
La réforme des statuts d'autonomie, dont les racines remontent à la Restauration, commença en Catalogne avec la proclamation illégitime de Macià le 14 avril. Par la suite, la rédaction du Statut de Núria fut entreprise et, après un long débat, il fut approuvé en 1932. Ainsi, le gouvernement et le parlement catalans obtinrent d'importantes compétences en matière d'économie, d'éducation, de culture et de questions sociales, bien qu'avec une capacité d'autofinancement réduite, et le catalan fut reconnu comme langue officielle.
Le cas du Pays Basque
Le cas du Pays Basque fut plus difficile et plus complexe : le statut d'Estella fut créé, mais il fut rejeté car jugé antidémocratique et confessionnel, et ne fut finalement adopté que pendant la guerre (1936).
Le cas de la Galice
Enfin, le statut de la Galice ne fut pas approuvé, car la région tomba aux mains des rebelles.
La réforme agraire et ses difficultés
La réforme agraire visait à s'attaquer au grave problème de la propriété et à ses échecs. Les objectifs fondamentaux étaient de remédier au retard technique, à la faible productivité et à la structure de propriété inadéquate et inefficace. Avec l'approbation de la ***Loi fondamentale de la Réforme Agraire*** (1932), l'objectif était la modernisation technique, la fin du féodalisme et la redistribution de la propriété. La loi fut mise en œuvre par l'Institut de Réforme Agraire (IRA), mais avec un budget initial nettement insuffisant. Après le coup d'État de Sanjurjo, des terres furent expropriées pour l'établissement des paysans, sans compensation pour les Grands d'Espagne en raison de leur soutien au coup d'État militaire, mais avec compensation pour les autres propriétaires. Les principaux problèmes surgirent en raison de sa complexité : elle fut paralysée par le manque de ressources et la faiblesse du budget initial, ainsi que par les recours des propriétaires devant les tribunaux, ce qui retarda sa mise en œuvre effective. Ainsi, la montée du chômage et l'impatience croissante des paysans conduisirent à l'occupation des terres et à l'incendie de nombreuses exploitations. De plus, les événements de Casas Viejas, où des travailleurs de la CNT affrontèrent la Garde Civile et la Garde d'Assaut, minèrent la crédibilité du gouvernement. Azaña fut durement attaqué par l'opinion publique. D'autre part, les opposants au gouvernement se réorganisèrent : les monarchistes fondèrent *Rénovation Espagnole* (1933) et les catholiques créèrent la *Confédération Espagnole des Droits Autonomes* (CEDA).
Autres réformes clés
La réforme de l'armée
La réforme de l'armée fut menée avec la loi sur le retrait des officiers, la fermeture de l'Académie de Saragosse, la suppression des Capitaineries Générales et l'abolition des tribunaux d'honneur, remplacés par le Conseil Suprême de Justice Militaire. En bref, peu de réalisations et beaucoup d'hostilité.
La réforme sociale
La réforme sociale améliora les conditions de travail avec la Loi sur les Contrats de Travail et la Loi sur les Jurys Mixtes, établissant un maximum de 40 heures par semaine et une hausse des salaires.
La réforme éducative
Quant à la réforme éducative, elle proposa une école laïque, mixte, gratuite et obligatoire. Le budget pour la construction d'écoles et le recrutement d'enseignants fut également augmenté.
Conclusion du Biennat Réformateur
En conclusion, le Biennat Réformateur peut être caractérisé comme une période courte mais très compliquée, qui tenta de construire un État démocratique, laïc et doté d'une forte justice sociale. Il apporta également l'espoir à ceux qui avaient perdu foi en la monarchie, mais suscita aussi la méfiance et la haine parmi ceux qui furent directement affectés par les réformes menées. Ainsi, les attaques continues reçues de la gauche comme de la droite, couplées à une crise interne au sein de la coalition républicano-socialiste, poussèrent Alcalá Zamora à dissoudre les Cortes Constituantes, arguant qu'elles ne représentaient plus l'état de l'opinion publique. De nouvelles élections furent convoquées en novembre 1933, et furent perdues par la coalition au pouvoir. En bref, les nombreuses réformes, en particulier la réforme religieuse et la réforme agraire, finirent par plonger le gouvernement dans une grave crise interne.