Structure des droits subjectifs : Théories et classifications
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Structure des droits subjectifs
Diverses théories
Ceux qui soutiennent l'existence de droits subjectifs sont divisés quant à la nature de leur structure, c'est-à-dire qu'ils sont en désaccord sur la détermination des éléments essentiels de cette notion.
Plusieurs théories s'intéressent au problème, mais trois principales se distinguent:
- Théorie de la Volonté, pour laquelle le droit subjectif est un acte de volonté;
- Théorie de l'Intérêt, qui soutient que le droit subjectif est un intérêt protégé par la loi; et
- Théorie de la Volonté et des Intérêts, qui considère le droit subjectif comme le résultat de ces deux facteurs.
Théorie de la Volonté
Fondée par Savigny et développée par Windscheid, cette théorie définit le droit subjectif comme un pouvoir accordé à la volonté par le système juridique. L'ordre juridique prescrit un comportement spécifique, mettant ce précepte à la disposition de celui en faveur duquel il est émis. Mais l'importance réside dans la volonté individuelle : la norme abstraite se spécifie par la volonté de l'individu, décisive pour la naissance du droit.
Plusieurs objections ont été formulées à l'encontre de cette théorie. Notamment, elle ne peut expliquer l'existence de droits indépendamment de la volonté du titulaire (incompétents, enfants). Ni comment une personne peut avoir un droit sans le savoir (héritage). Ni comment un enfant à naître peut avoir des droits.
Théorie de l'Intérêt
Fondée par Ihering, cette théorie soutient que l'existence de droits subjectifs découle des fins que le titulaire souhaite atteindre. Ces objectifs, protégés par la loi, constituent la substance du droit. Le droit subjectif est donc « un intérêt juridiquement protégé ».
Parmi les objections à cette théorie, on note:
- L'intérêt n'est pas l'essence du droit, mais sa finalité. Le droit subjectif implique aussi la possibilité d'une action individuelle, un acte de volonté.
- Comment concilier cette théorie avec l'exercice de droits sans intérêt particulier ?
- Certains intérêts protégés par la loi ne constituent pas des droits subjectifs (règles de police).
Théorie de la Volonté et des Intérêts
Fondée par Bekker, cette théorie soutient que la structure des droits subjectifs repose sur la volonté et l'intérêt. La première définit le droit, le second son contenu. Le droit subjectif est « le pouvoir d'agir dans un intérêt individuel ou collectif, dans les limites de la loi ».
Les critiques de cette théorie s'appuient sur les arguments contre les théories de la volonté et de l'intérêt.
Classification des droits subjectifs
Nécessité de classer
La diversité des relations entre les personnes justifie la classification des droits subjectifs. Ce travail est complexe, car il existe des points communs entre plusieurs groupes et des différences au sein de chaque groupe. Plusieurs classifications existent, mais certaines catégories font consensus.
Classifications selon l'efficacité et l'objet
Deux grandes classifications existent :
- Selon la nature subjective et l'efficacité du droit : droits absolus et relatifs, droits originaires et dérivés, droits purs et simples et droits soumis à modalités.
- Selon l'objet et le contenu : droits publics et privés, droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux.
Droits absolus et relatifs
Les droits absolus ont une efficacité universelle et peuvent être opposés à quiconque. Ils impliquent une obligation générale de ne pas perturber le titulaire (ex: droits de la personnalité, droits réels).
Les droits relatifs ont une efficacité limitée et ne peuvent être opposés qu'à certaines personnes. Ces personnes sont tenues de respecter le titulaire (ex: droits personnels, obligations).
Droits originaires et dérivés
Les droits originaires naissent indépendamment de l'activité du titulaire (ex: droits liés à la personne). Les droits dérivés résultent d'un acte du titulaire.
Droits transmissibles et non transmissibles
La plupart des droits sont transmissibles, mais certains, étroitement liés à la personne, ne le sont pas (ex: droits de la personnalité, certains droits familiaux).
Droits purs et simples et droits soumis à modalités
Les droits purs et simples ne sont soumis à aucune modalité. Les droits soumis à modalités sont affectés par un terme ou une condition.
- Le terme est un événement futur certain dont dépend l'exercice ou l'extinction du droit.
- La condition est un événement futur incertain dont dépend la naissance ou l'extinction du droit.
Droits éventuels
Le droit éventuel est un droit futur protégé par l'octroi d'un droit actuel visant à sa protection. Il existe deux droits : un droit intérimaire (actuel, pur et simple) et un droit futur. Le droit intérimaire prépare l'acquisition du droit futur. Lorsque l'événement se réalise, le droit intérimaire disparaît et le droit futur naît.
Droits publics et privés
Les droits publics relèvent du droit public. Les droits privés relèvent du droit privé.
Droits patrimoniaux et extrapatrimoniaux
Les droits patrimoniaux ont une utilité économique (ex: droit de propriété). Les droits extrapatrimoniaux n'ont pas d'utilité économique directe (ex: droits de la personnalité, droits familiaux).
Exonération de droits
Renonciation aux droits
Le Code civil dispose que l'on peut renoncer aux droits conférés par la loi, tant qu'ils ne concernent que l'intérêt individuel et que la renonciation n'est pas interdite.
On peut renoncer aux droits présents et futurs, sauf interdiction légale (ex: succession non ouverte).
La renonciation est une déclaration unilatérale par laquelle le titulaire abandonne son droit sans le transférer. Elle entraîne l'extinction du droit.
La renonciation est un acte unilatéral, libre de formalités (sauf pour les droits réels), abstrait, irrévocable et généralement bénévole.
La renonciation n'est pas une présomption, sauf disposition légale contraire.
Les renonciations générales ne sont valables que s'il n'y a pas d'ambiguïté sur l'objet.
La renonciation ne doit pas être confondue avec l'aliénation, qui implique le transfert du droit à un autre titulaire.