L'univers littéraire de Mario Vargas Llosa : Analyse

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Les premières fictions : Les Chefs

Les Chefs reflète une grève des étudiants dans une école qui suit la décision des autorités d'imposer un calendrier d'essais spécifiques. Mais alors qu'il y a une confrontation avec les enseignants, nous découvrons la lutte secrète entre deux leaders, les muchachos. À la fin, la grève elle-même est défaite et Lu reçoit des enfants eux-mêmes une réaction humiliante. Toutefois, à ce moment, le rival lève les yeux ; le narrateur se tend vers lui et lui donne la main dans un geste de solidarité.

Codes d'honneur et rivalités adolescentes

Dans Le Défi, un code d'honneur douteux empêche un parent d'aider un enfant alors qu'il se bat à mort dans une bagarre avec un autre garçon. Le Dimanche reflète une rivalité entre deux adolescents, dans ce cas pour une fille. Des concours sont organisés pour voir qui est le plus viril, notamment lorsque les deux se jettent à la mer pour voir qui peut nager le plus vite. Toutefois, l'un des deux est sur le point de se nager, et l'autre rompt avec l'ordre établi pour lui porter secours.

Trahisons et remords

Dans Le Frère aîné, deux frères cherchent et tuent un Indien parce qu'ils croient qu'il a violé leur sœur. À leur retour au ranch, la jeune fille avoue son mensonge, concocté pour évincer l'employé indien qui, d'ailleurs, n'avait jamais rien tenté avec elle. Ensuite, le frère cadet, pris de remords, réagit en libérant le reste des Indiens qui avaient été sanctionnés dans le ranch, comme l'avait été son compagnon. Le Visiteur, dans une ambiance d'anticipation de La Maison verte, se réfère à un réseau de trahisons successives : un homme trahit son ami, qui est fait prisonnier par les soldats ; à leur tour, ils sont laissés seuls face à un informateur, car les compagnons du prisonnier en prirent ombrage.

Techniques narratives et réalisme

En dehors de l'histoire à la troisième personne, le récit présente trois narrateurs avec leur point de vue particulier : Albert, Boa et Jaguar. Tous sont étudiants, mais chacun d'eux filtre la réalité selon sa façon particulière de concevoir le monde : une approche naturaliste. Le réalisme de la représentation critique de la réalité environnante confine au naturalisme. L'atmosphère étouffante de l'école Leoncio Prado détermine la misère des comportements des élèves : la violence et le machisme dominant sont le résultat d'une réception carcérale militarisée.

La Maison verte : Exploitation et destin

Dans Les Chiots, Bonifacia (de La Maison verte) tombe amoureuse du brutal sergent Lituma. La jeune fille se marie et connaît un bonheur temporaire car, lorsqu'ils partent à Piura, loin de la jungle, le mari s'adonne à une vie dissolue en compagnie de ses amis, les Champs. Lituma est envoyé en prison et, en son absence, ses amis séduisent Bonifacia et la forcent à travailler comme prostituée dans la Maison verte. Les religieuses de la mission, qui se consacrent à évangéliser les indigènes avec l'aide des soldats, les introduisent ensuite dans la civilisation en tant que fonctionnaires.

Critique sociale et exploitation

L'exploitation des autres est peut-être le thème dominant. Dans la ville, c'est l'exploitation sexuelle des femmes dans la prostitution ; dans la jungle, elle est utilisée de manière similaire. En fait, le machisme violent est présent dans tous les domaines car, même dans la forêt, la relation entre Bonifacia et le sergent commence par une violation.

Conversation à la cathédrale

L'action commence dans le bar La Cathédrale, où se rencontrent, après des années de séparation, Santiago Zavala, un journaliste d'une famille de la classe supérieure, et Ambrosio Pardo, l'ancien chauffeur de son père, Fermín. Les deux personnages vont tisser une longue conversation dans laquelle de multiples souvenirs sont déclenchés par une structure fragmentée. Le sentiment prédominant est celui de la perte qui bouleverse les personnages. Les maux du Pérou sont dus à la corruption morale de toutes les classes sociales.

Trajectoires sociales et politiques

La première histoire d'intérêt est celle de Santiago Zavala lui-même. On pourrait dire qu'il représente la mauvaise conscience des intellectuels péruviens ; il affronte sa famille en étudiant dans l'université « rouge » de San Marcos plutôt que dans une institution catholique. Après avoir quitté l'école, il commence à travailler dans un journal. Ses vues politiques dissonent également avec son cercle social et familial. À une occasion, il est arrêté par la police et c'est l'influence de son père qui le sort de prison. Son dernier défi majeur envers Don Fermín est d'épouser une femme noire.

Le parcours de son partenaire, Ambrosio, est beaucoup moins heureux. Il est mulâtre, métis de noir et d'indien ; son origine raciale et sociale ne lui permet pas de viser très haut. Dans un premier temps, il travaille comme chauffeur pour la police. Dans ce travail, il apprend à ne pas être choqué par les abus et les impositions qu'il voit autour de lui. Cependant, fatigué d'être contaminé par la pègre, il passe au service du père de Santiago, Fermín Zavala. Mais d'autres situations négatives, parmi lesquelles la fausse couche de sa compagne Amalia, le font sombrer dans la situation où il est retrouvé par Zavalita : employé de la fourrière.

Corruption et pouvoir sous le régime Odría

Don Fermín est un père de famille respectable qui recèle une vénalité inépuisable pour les affaires et un cynisme politique considérable. Cependant, l'aspect le plus désagréable de sa personnalité se révèle à la moitié du roman, quand le lecteur découvre que, pendant des années, il a abusé sexuellement de son chauffeur, Ambrosio. Cayo Bermúdez, quant à lui, a acquis des positions au sein du gouvernement d'Odría. Depuis son poste ministériel, il domine la police. Grâce à un système d'espionnage, de menaces et de corruption, il extermine lentement ses rivaux et devient la force noire du régime.

C'est une personne frustrée sexuellement, dont les penchants voyeurs sont mis en évidence dans le roman. Après une saison d'exil, il retourne au Pérou où il trouve une retraite dans une station balnéaire de luxe qu'il peut se permettre grâce à ses profits illicites très importants. Ainsi, Santiago Zavala aurait pu être une victime des adeptes de Cayo Bermúdez sans l'intervention de son père. En même temps, Hortensia Bermúdez, une prostituée toxicomane et alcoolique, est utilisée pour leurs « petites fêtes », auxquelles Fermín Zavala participe. Avant de tenter de faire chanter l'oligarque riche avec des informations sur ses préférences sexuelles, Hortensia est tuée des mains d'Ambrosio. Ce dernier ne tue pas pour cacher sa propre humiliation, mais par fidélité et respect pour Don Fermín, celui-là même qui l'humilie.

Fiction politique et hiérarchie militaire

Le récit propose une « fiction politique » sur le régime Odría. Ainsi, la relation entre les personnages est toujours celle de l'oppresseur face à l'opprimé, en conformité avec ces préjugés. Dans cet ensemble de relations, il est facile de voir une fatalité sociale imposée : les dirigeants vivent dans certaines zones, occupent des postes importants et ont la peau blanche.

Pantaleón et les visiteuses

L'histoire de Pantaleón et les visiteuses raconte la mise en place d'un service de prostituées pour les soldats stationnés dans la jungle péruvienne. L'organisation est l'œuvre d'un soldat qui se présente, par ailleurs, comme un mari modèle : le capitaine Pantaleón Pantoja. Il existe des similitudes avec la production précédente : l'emplacement dans la jungle (comme dans La Maison verte) ou la critique de la hiérarchie militaire (comme dans La Ville et les Chiens). Les thématiques de la prostitution et de la dépravation sexuelle y sont également centrales.

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